Seuls avec la poisse

Samedi matin dernier, nos beaux amis Lise et Daniel nous ont quittés. Ce matin-là, ils ont pris la 40 en direction d’Albuquerque. Avant la fin du mois d’avril, ils seront de retour au Québec.
Notre premier contact remonte au début de décembre. Nous étions perdus, souvenez-vous, dans le froid de Nashville et nous avions un rat pour coloc. Avons-nous la poisse? m’étais-je demandé sur le blogue. Daniel m’avait aussitôt envoyé un courriel pour nous remonter le moral. «Si ça vous dit de nous faire signe, n’hésitez pas.»
J’ai hésité un peu, car nous ne comptions pas nous rendre en Floride. Mais au bout de quelques jours, j’ai dit à Lise que nous devrions changer de cap. Je me félicite encore de m’être fié à mon intuition. Nous sommes donc allés les rejoindre à Fort de Soto, près de Tampa. Ils étaient sur le point de retourner chez eux pour les Fêtes. Dès leur retour, ils sont venus nous retrouver dans le nord-ouest de la Floride.
Depuis, nous avons été inséparables, sauf pour de courtes périodes. Pendant ces 10 semaines, nous avons partagé les mêmes routes, les mêmes sentiers, les mêmes campings. Nous avons échangé nos informations, pris l’apéro ensemble et parlé pendant des heures. Malgré cette proximité, je ne me souviens pas d’un seul moment de tension tant nous étions sur la même longueur d’onde.
Daniel a aussi été un G.O. hors pair. Presque tous les jours, il arrivait en nous disant : «J’ai une proposition pour demain.» Nous acceptions presque toujours, non que nous soyons particulièrement dociles, mais ses suggestions étaient excellentes.
Quant à Lise, c’est l’artiste du iPad. Avec gentillesse et patience, elle nous a initiés à des tonnes de logiciels, qui nous faciliteront la vie tout au long du voyage.
Bref, le sourire radieux de Lise et le sourire espiègle de Daniel nous manquent. Ce sont des gens formidables. Je tenais à le dire, même si cet éloge va mettre à mal leur modestie, en particulier celle de Lise.
Une fuite de propane

Et eux partis, on se demande si la poisse n’est pas revenue. Lundi en tout cas, au moment de faire le souper, plus une goutte de propane. Le matin même pourtant, j’avais vérifié le tableau : il indiquait de bonnes réserves. Mais là, plus rien. Malgré l’heure tardive, j’ai pris mon courage à deux mains pour aller frapper à la porte du propriétaire du camping, qui a eu la gentillesse de venir faire le plein.
Le lendemain cependant, ça sentait le gaz à l’extérieur de La grande bleue et on entendait un léger sifflement. On a aussitôt fermé l’entrée du propane. Nous avons été bien inspirés, car une heure plus tard, un employé d’une station de propane de Cortez confirmait une fuite importante, sous l’autocaravane. Mais il était incapable de la colmater. Il nous a conseillé de nous rendre à Durango, 90 kilomètres plus loin, dans un centre de VR.
Là, il a fallu insister pour que le mécano en chef consente à jeter un œil à la fuite. C’est d’ailleurs tout ce qu’il a fait. Il s’est vite dit incapable de corriger le problème. Qui pouvait le faire? Il n’en avait évidemment aucune idée. Je me serais bien querellé avec Big John, mais il mesurait au moins deux mètres et ses épaules faisaient deux fois la largeur des miennes. Et puis, j’étais surtout découragé.
C’est alors que j’ai pensé à la FQCC, qui offre un service accès-réparations. La préposée m’a rapidement trouvé un autre centre de services, mais c’était à quelque 80 kilomètres plus au sud et on ne pouvait nous recevoir avant le lendemain.
Mercredi matin, nous voilà donc chez Al’s Trailer, à Farmington, où on nous reçoit très gentiment. Mais 15 minutes plus tard, autre mauvaise nouvelle. Le mécano a repéré la fuite, mais il n’a pas la pièce qu’il faudrait remplacer. Son patron nous conseille de nous rendre à Albuquerque, 300 kilomètres plus loin.
Devant nos mines déconfites, Harry nous propose une autre solution : il va téléphoner chez Leisure Travel au Manitoba et faire venir la pièce. Elle n’arrivera toutefois pas avant vendredi, au mieux. Au moment où j’écris ces lignes, il est 14h30 vendredi, et la pièce n’est toujours pas arrivée. Depuis deux jours, nous tuons le temps dans une ville laide et dans un camping sans arbre et sans charme. J’ai bien peur que nous devions attendre jusqu’à lundi.
De surcroît, il fait froid. Quand nous avons vu la neige sur le puits de lumière jeudi matin, en nous réveillant, nous avons eu un moment de déprime, le premier du voyage. Et vendredi matin, la thermopompe, dont nous devons nous servir faute de chauffage au propane, était en panne. Les pieds sur un plancher froid, nous avons connu notre deuxième moment de déprime.
Heureusement, nous venons d’acheter une petite chaufferette portative. La nuit prochaine, nous ne devrions pas grelotter.
Le problème du propane corrigé, nous pourrons repartir vers les canyons du Big Cercle. Le week-end dernier, nous avons visité le Canyon de Chelly, en territoire navajo. Ce n’est pas un des plus connus, mais il est d’une grande beauté. Si vous vous y rendez, n’hésitez pas à emprunter le sentier qui descend dans le canyon. Même un randonneur affecté par le vertige comme moi peut le faire. Et la remontée n’est pas trop rude, juste tonique.
Lise vous fait ses amitiés. À samedi en huit.

J’aime bien la photo de vous quatre. Vous avez l’air de 2 couples en forme et en santé!
La dernière photo est magnifique également.
Très beau ce canyon. Pour notre part, nous avons fait nos deux premiers longs voyages en motorisé dans l’ouest, suivis de deux en Floride. Le prochain est définitivement un retour à l’ouest et le Pacifique. Nous avons aussi testé nos capacités de séjourner plus longtemps en un même endroit, mais nous préférons finalement être mobiles.
En passant, concernant un billet précédent, il y a bien un point d’eau à Quarzsite, ainsi qu’une station de vidange. Ces services se trouvent du côté est de la route un peu au sud de la ville.Mais la zone est tellement grande qu’il est facile de ne pas les trouver.
Merci pour ce blogue. Très intéressant et avec une belle touche d’humour.
Bonne chance avec cette fuite, mais dites vous bien que selon certaines personnes bien informées, les véhicules récréatifs neufs ont très souvent des problèmes. Certains vont même dire que c’est le cas de la moitié de la production qui en a (chut! faut pas le dire!).
PS Peut-être qu’après lundi nous aurons le bonheur, ici, d’être vraiment le pays de la Charte, comme vous dites. Sinon, on nous affichera sûrement à un autre palmarès et vous aurez à corriger tous vos billets 😉
Quand je parlais du pays de la Charte, j’ai conservé un flou volontaire, par respect pour les opinions contraires, mais aussi parce qu’il ne s’agit pas d’un blogue politique. Cela dit, votre interprétation me force à dire que, lorsque je parlais du pays de la Charte, c’était ironique. Pour ma part, je n’aimerais pas vivre dans un pays qui s’attaque aux droits fondamentaux.
Ma conjointe et moi sommes Lise et Daniel dont parle Paul dans son carnet. C’est en novembre que j’avais lu que Paul, alors un inconnu, commettrait un blogue dans le magazine de la FQCC. En consultant ses précédents carnets de voyage, nous nous sommes dits qu’il nous semblait être une personne très intéressante à rencontrer et éventuellement côtoyer.
Comme notre projet de voyage rejoignait le leur, nous avons communiqué avec eux et offert de les rencontrer en Floride avant de partir ver l’Ouest. Ce qui fut fait à Fort de Soto. C’est un peu comme un *blind date*, on ne sait trop ce qu’il en sortira. Or, ce fut une rencontre étincelante, au cours de laquelle nous nous sommes découverts beaucoup de points communs, autant dans le choix des itinéraires que des randonnées, visites et campings. Sans parler des discussions et des positions communes que nous partageons sur le Québec, mais dont je ne parlerai pas ici.
Nous avons donc adoré le temps passé avec eux. Ce fut extrêmement triste de les quitter. Jamais nous n’oublierons nos randonnées. La vivacité et la joie de vivre de la pétulante Lise nous servait d’allumage, le calme de Paul nous séduisait par sa sérénité. Et toujours, autant pour nous que pour eux, avec un grand souci de l’intimité et de nos vies privées. Décidément des gens à rencontrer.
Nous sommes déjà loin d’eux et désolés de ne pouvoir les aider à passer ces moments d’attente dans un bled perdu où il fait froid. Dans quelques jours, leur positivisme leur aura fait oublier tout ça. Bon voyage Paul et Lise, des amis pour toujours.
Lise et moi sommes très émus devant ce témoignage. Vous n’êtes pas là, mais votre présence nous fait grand bien.