Kouchibouguac, NB, 6 h du matin. Des voix viennent brusquement mettre un terme à ma nuit. Pourtant, dehors, le ciel nuageux laisse tomber une pluie fine créant des conditions idéales pour sommeiller. Que se passe-t-il donc ?
Mes voisins, deux couples voyageant en tente-caravane, ont entrepris de lever le camp de bon matin. Ignorant la règle la plus élémentaire qui, sur un terrain de camping, impose de ne pas faire de bruit avant 8 h, ils ont décidé qu’ils en avaient assez. Tant pis pour ceux qui restent !
Voyager en tente-caravane implique qu’il y a beaucoup de choses à ramasser quand vient le moment de partir. Fermer les chaises pliantes et les secouer soigneusement pour être bien certains qu’aucun perce-oreille n’y a élu domicile, ranger la vaisselle, rouler les sacs de couchage, essuyer les toiles, les replier, balayer et rouler le tapis de sol, baisser le toit, atteler l’auto, raccorder les circuits électriques. Bref, toute une corvée !
Comme le temps est plutôt maussade, les deux couples sur le départ s’encouragent mutuellement. Même Tarzan, un chien à peine plus gros qu’un mulot appuie les efforts de ses maîtres de ses jappements aigus. Chacun y va de sa plaisanterie et Dieu sait que les rires portent loin dans l’air du matin.
« Right flasher, left flasher, brake » criait une voix nasillarde. Pourtant, il aurait été si simple de ne faire qu’un simple geste de la main pour procéder à la vérification du bon fonctionnement des feux. Non, il lui faillait parler fort, très fort, pour être certaine d’être bien comprise. Heureusement, cela se passait en anglais. Imaginez combien la réputation de Québécois en aurait pris un coup si ces caves avaient parlé français.
Non, mais pour qui se prennent-ils, ces impolis ? S’imaginent-ils être tout seuls au fond des bois ? Nous sommes dans un parc national du Canada. Même si le design des terrains procure une impression qu’il n’y a pas de voisins parce qu’on ne les voit pas, ils ne sont qu’à quelques branches d’épinette de distance. Et ils aimeraient bien pouvoir dormir.
Sur la table de bois de l’emplacement, l’un des joyeux lurons frappe avec force les blocs qu’il avait placés sous les béquilles aux quatre coins du VR pour y déloger la boue et d’éventuels cailloux incrustés. Bang Bang! Juste pour être certain que je suis bien réveillé. Jubilant de joie, Tarzan encourage son maître à frapper encore plus fort. Ouaf ouaf ouaf! Il est des fois où j’aimerais voyager durant la période de chasse au clébard.
Les parcs nationaux attirent particulièrement la faune des tentes-caravanes. Un phénomène que nous avons noté tant à Forillon qu’ici à Kouchibougouac, les deux parcs canadiens que nous avons visités récemment. Or, on le sait, après la tente, la tente-caravane impose que l’on vive beaucoup à l’extérieur. Dans le cas des tentes, faute d’espace, les bagages sont limités au minimum : pas de chaises longues pliantes, pas de gros barbecue au propane, de tables, d’accessoires ou d’une pléthore de jouets pour les enfants. Tout au plus un Frisbee ou un ballon de football. Après tout, au départ, tout ce bagage dont entrer dans la voiture.
La situation est bien différente dans le cas des tentes-caravanes. Celles-ci permettent en effet d’emporter beaucoup plus d’accessoires et de bagages, alors on en profite. Chaque fois que l’on monte le camp, il faut sortir tous ces bidules pour libérer l’espace intérieur. Et l’on se répand tout autour en oubliant qu’au moment du départ, il faudra tout ranger.
Dans mon demi-sommeil et ma rage, je n’ai pu m’empêcher de penser combien, il était différent de voyager en tente-caravane et en autocaravane ? Ainsi, ce matin, le caravanier serait sorti, seul, débrancher le fil d’alimentation électrique qu’il aurait rangé dans une soute. Pendant ce temps, sa femme aurait, sans bruit, rangé les choses à l’Intérieur et appuyé sur un bouton pour fermer les rallonges escamotables. Monsieur serait monté à bord et, après mis le moteur en marche, serait parti sans ameuter tout le voisinage.
Bien sûr, le comportement excessif de nos voisins et de Tarzan ne constitue pas une règle générale. Je connais de très nombreux caravaniers en tente-caravane qui se soucient de respecter leurs voisins. J’ai aussi rencontré des caravaniers qui, en quittant leur emplacement, actionnaient les bruyantes flutes à air de leur VR pour dire au revoir à leurs voisins.
Maintenant qu’ils sont partis et que je suis réveillé, aussi bien me lever. Tiens, je vais rédiger mon carnet hebdomadaire, cela va m’aider à quitter ma mauvaise humeur.
Morale de l’histoire : Il n’y a pas que dans le stationnement des Walmart que l’on peut voir des « Bougons ».
Peut-être faudrait-il y a avoir un système de dénonciation dans l’espoir de faire la leçon à ceux qui ne savent pas respecter les autres…
Les étudiants ont bien leur site « rate my teacher »!
Moi, j’aimerais qu’on m’explique pourquoi, dans un site avec 5 aménagements pour VR, tentes et roulottes, le nouveau venu se sent obligé de s’installer collé sur celui qui est arrivé avant lui ? Pourquoi il ne s’installe pas sur n’importe quel autre site plus loin, par exemple ? On dirait que j’ai l’air de manquer d’affection.
Le site est désert au km 411 de la route de la Baie-James. On installe notre motorisé. Un colon vient planter sa tente tout près de nous, mais vraiment tout près. Le soir venu, en plus de nous boucaner avec son feu de camp, il nous écœure avec sa musique à boum-boum. Jusqu’à minuit.
Le lendemain matin, 9h, ça recommence. J’haïs ça la musique à boum-boum. J’ai le droit de ne pas entendre celle des autres.
Trop, c’est trop. À colon, colon et demi. Pour son malheur, il a opté pour le côté du VR où se trouve la génératrice. Je pars le bal sans me soucier de lui et de sa blonde en train de relaxer dans la tente à deux pas. Vapeurs d’essence et bruit infernal couvrent non seulement la musique… mais la tente aussi.
Le colon et sa nounoune (jurant sans doute contre les maudits VR qui polluent l’air et les empêchent de se détendre) remballent et s’en vont. Bon vent !
J’éteins la génératrice.