Question de frontière
Depuis plus de onze ans, j’ai toujours respecté comme premier critère d’écrire des billets dominicaux sur un sujet ayant un rapport direct avec les caravaniers et leur loisir. Pourtant, celui d’aujourd’hui, même s’il respecte cette règle, prend aussi une connotation politique. Car, oui, des décisions politiques peuvent également affecter le caravaning.
Une fois de plus, cette semaine, la fermeture des deux côtés de la frontière entre le Canada et les États-Unis a été prolongée d’un autre mois. Ouf ! Une bonne, nouvelle souhaitée par plusieurs, dans la lutte contre la pandémie. Pourtant, considérant que chacun des deux pays est souverain, qu’il peut et doit prendre des décisions basées sur l’intérêt et la sécurité de ses citoyens, comment expliquer qu’il faille négocier pour en arriver à une décision.
Comme c’est souvent le cas, la primeur de la nouvelle vint des autorités gouvernementales américaines. Quelques heures plus tard, Bill Blair, ministre de la Santé publique du Canada répétait la nouvelle à ses concitoyens. Stratégie pour démontrer que nos voisins tenaient le haut du pavé dans l’idée de garder les frontières fermées, sans doute, du moins, c’est l’impression qui s’en dégage.
Dans son allocution, Bill Blair affirma haut et fort que le gouvernement fédéral allait « continuer à faire tout ce qui est nécessaire pour assurer la sécurité des Canadiens ». Bravo, M. le ministre, mais en quoi une négociation est-elle nécessaire pour en arriver à une décision qui relève exclusivement des autorités canadiennes ? Si, dans votre esprit, la politesse et la recherche d’une meilleure communication entre voisins justifient une négociation, ne serait-il pas plus approprié de parler d’une simple discussion pour mieux comprendre et harmoniser les règles administratives appliquées à chacun des postes frontaliers ?
Je peine à comprendre pourquoi la décision d’interdire la traversée de la frontière aux citoyens américains se doit d’être révisée chaque mois. Serait-ce que le gouvernement fédéral souscrit à l’assertion de Donald Trump à l’effet que le coronavirus va disparaître comme par magie ? Pouf ! Morte, la bibitte.
Depuis des mois, niant l’importance du coronavirus, nos voisins vivent dans une zone chaude, pour employer un terme cher à nos experts en santé publique. Des actions prises depuis longtemps par le Canada font que le pays constitue une zone froide. Il est de notoriété publique que le meilleur moyen d’enrayer efficacement une contamination consiste à enlever une maille dans la chaîne de transmission. Or, pendant ce temps, les États-Unis continuent de prendre la pandémie avec insouciance et légèreté.
Encore cette semaine, 240 000 personnes, venues de partout aux États-Unis, étaient réunies à Sturgis, SD, pour la semaine du party annuel des amateurs de Harley-Davidson. Respect de la distanciation physique et protège-visages n’étaient pas au programme. La fête finie, chacun de ces motards s’en est retourné dans son habitat naturel pour, telles des abeilles, aller polliniser son milieu. Les conséquences directes de ces lendemains de veille deviendront manifestes dans une semaine ou deux.
Le manque de sérieux des Étatsuniens s’observe également d’une autre façon. Plusieurs caravaniers de ce pays se présentent aux postes frontaliers canadiens attestant qu’ils souhaitent se rendre en Alaska. Comme le Nouveau-Brunswick et l’île du Prince-Édouard l’ont fait pour les Québécois désireux d’aller aux Îles-de-la-Madeleine, ces caravaniers sont autorisés à emprunter les routes canadiennes, à condition de suivre un itinéraire menant directement à l’Alaska.
Or, une fois la frontière derrière eux, inconscients du danger et non respectueux du pays qui leur accorde ce privilège, ils sont nombreux à mettre de côté cette consigne obligatoire pour se promener où bon leur semble. Après tout, en matière de covid-19, le Canada est un pays beaucoup plus sécuritaire que le leur.
Le problème, c’est que ce sont eux les dangereux. Heureusement pour le Québec, aucun caravanier américain ne se présente au poste-frontière de Saint-Bernard-de-Lacolle alléguant qu’il est en route pour l’Alaska. Cette situation se vit surtout en Alberta et en Colombie-Britannique.
L’idéal serait que, peu importe la position d’États-Unis, la frontière canadienne demeure interdite à nos voisins. Cela, jusqu’à ce que ce pays ait repris le contrôle de la pandémie sur son territoire. En agissant ainsi, les autorités canadiennes affirmeraient avec force leur autonomie décisionnelle et démontreraient hors de tout doute que la santé et la sécurité de la population sont vraiment des valeurs incarnées.
Parce qu’ils sont eux aussi souverains, les États-Unis pourraient malgré tout ouvrir leur frontière aux Canadiens. Pour eux, les inconvénients seraient minimes puisque les visiteurs canadiens quittent une zone froide — sans aucune référence au climat — pour une zone chaude, et non l’inverse. Le risque d’aller infecter nos voisins serait somme toute négligeable.
Conscients des risques associés à un voyage aux États-Unis, une ouverture de la frontière américaine permettrait aux caravaniers de chez nous, déjà conscients et sensibilisés à l’importance des mesures de prévention de la maladie et les appliquant avec rigueur, de choisir ou non d’aller passer l’hiver dans le véritable champ de mines que sont plusieurs états du sud.
Ce serait leur choix certes, mais avouons que cela pourrait dépanner de nombreux nomades à plein temps.
Les Américains peuvent ouvrir la frontière, ce qui pourra accommoder les caravaniers à plein temps. Un VR l’hiver, ce n’est pas le meilleur logement au Canada, avec des planchers de rallonges extensible n’ayant souvent aucune isolation. À notre centre de VR de Bradenton, tous les Québécois ont confirmé leur absence pour l’hiver prochain, et aussi un couple de la Nouvelle-Écosse qui y possède une maison mobile. Pour nous, possiblement fin janvier, lorsque l’Oncle Donald aura quitté la Maison blanche. Mon épouse s’inquiète un peu, elle n’a pas conduit dans la neige depuis plus de dix ans. Et bien on ne sort qu’en cas d’urgence si il neige…
J’imagine les tracas pour les « fulltimers » « ceux qui vivent à l’année dans leur vr », à savoir si ils pourront aller vers le SUD ou si ils devront hiverniser leur vr et louer un logement meublé pour les mois d’hiver.
Bonne chance à vous tous !