Avec l’été à nos portes, de nombreux lecteurs s’interrogent sur la légalité de traverser certains ponts ou tunnels au volant de leur autocaravane. Tous déplorent la confusion régnant entre le libellé de la réglementation et la façon dont les constructeurs de véhicules récréatifs affichent le volume des réservoirs de propanes. Essayons de clarifier les choses.

Le code de la sécurité routière interdit aux conducteurs automobiles d’emprunter le pont tunnel Louis-Hippolyte Lafontaine, le Joseph-Samson, ainsi que les tunnels de Ville-Marie-Viger et Melocheville lorsqu’ils conduisent un véhicule routier, ou un ensemble de véhicules routiers, qui transporte ou utilise des bouteilles à gaz des classes 2.1, 2.3 (2.1), 2.2 (5.1) et 2.3 (5.1), sauf si ces matières sont dans au plus 2 bouteilles de 46 litres et moins de capacité chacune (difficile d’écrire plus mal, mais il s’agit de la formulation retenue par les avocats auteurs du règlement). À défaut de se conformer, les contrevenants s’exposent à une amende très salée risquant de les faire « exploser » de colère.

La première source de confusion provient du texte même du MTQ. En effet, un peu plus loin dans leur document, on peut lire qu’il est possible de rouler dans ces mêmes lieux avec, à bord, un réservoir d’au plus 75 litres de liquide inflammable pouvant servir à alimenter des appareils ou accessoires. Encore cette semaine, un commerçant de VR me servait cet argument en soutenant que le frigo du véhicule récréatif fonctionnant au propane, il était possible d’invoquer cette clause pour être en règle dans les tunnels. Erreur, grossière erreur !

Le propane ne peut entrer dans la catégorie des liquides inflammables, pour la simple raison qu’à son état naturel, il est un gaz. Par comparaison, l’eau se définit comme un liquide, un point que personne n’oserait remettre en cause. Pourtant il est possible de l’amener à un état solide par la congélation ou encore de la transformer en vapeur en la faisant bouillir. Malgré ces transformations d’ordre physique, demandez à n’importe quel quidam de définir ce qu’est de l’eau et la première chose qu’il répondra sera d’affirmer que l’eau est un liquide. Selon la même logique, le propane est un gaz, point à la ligne.

L’autre confusion, plus importante celle-là, découle de la multiplicité des systèmes de poids et mesures mis en cause. Au Canada, on peine encore à délaisser un système impérial appris à l’école primaire, il y a cinquante ans. S’ajoute à cette difficulté le fait que nos voisins du sud font partie des trois pays n’ayant pas adhéré au système international de poids et mesures en vigueur partout ailleurs sur la planète.

Pour compliquer davantage, les constructeurs de véhicules récréatifs emploient indifféremment deux valeurs (livre et gallon étatsunien) pour désigner le volume des réservoirs de propane, mais également ceux des eaux grises et noires. Tout serait tellement plus simple s’ils parlaient de litres, comme le reste du monde. Un dernier élément, lié à l’interdiction de remplir à plus de 80 % un réservoir de propane, vient augmenter la complexité de s’y retrouver dans ce charabia.

De façon très claire, la réglementation québécoise fixe à 46 litres le volume maximal d’un réservoir et impose un maximum de deux bonbonnes. La procédure reconnue pour déterminer le volume d’un réservoir consiste à le remplir d’eau à ras bord et de mesurer cette eau. Contrairement à un gaz, l’eau n’est pas compressible, ce qui permet d’obtenir une mesure de volume constante et fiable. Conséquemment, un réservoir de propane ne contenant pas plus de 46 litres d’eau peut être emporté dans les zones à accès limité mentionnées au début.

Jongler avec les concepts de livre, kilo, litre, gallon étatsunien et gallon impérial et tenter de trouver une juste conversion n’est pas chose aisée. J’ai donc contacté le Ministère des Transports du Québec, responsable de l’application du Code de la route afin de démêler le tout, de même que des entreprises spécialisées dans la vente de propane ainsi que des fabricants et commerçants de VR.

Cependant, avant d’aller plus loin et de conclure, je considère important de rappeler quelques mesures fréquemment utilisées et leurs équivalences.

1 gallon étatsunien : 3,785 litres ou 8 livres d’eau

1 gallon impérial : 4,54609 litres ou 10 livres d’eau

1 gallon US de propane : 1,923 kg ou 4,24 livres

1 litre de propane : 0,508 kg ou 508 grammes ou 1,12 livre

1 litre d’eau : 1 kg ou 1 000 grammes ou 2,2 livres

Voici un tableau établissant diverses conversions des bonbonnes les plus fréquentes généralement nommées en livres :

Il est donc permis de rouler n’importe où sur nos routes avec un véhicule récréatif transportant une bonbonne — ou deux — de 40 livres, mais surtout pas trois, même si la dernière est aussi petite qu’une bonbonne jetable pour barbecue ou une de butane pour le réchaud d’appoint. Si la norme concernant le propane ne pose donc aucune difficulté aux propriétaires de caravanes tractées ou portées puisque les réservoirs de leur VR dépassent rarement 30 livres, il n’en va pas de même pour les autocaravaniers.

La plupart des autocaravanes, même certaines de classe B, disposent d’un réservoir beaucoup plus volumineux. Il faut donc s’en reporter à la fiche signalétique apposée dans l’autocaravane pour déterminer l’admissibilité de son VR à rouler dans le pont-tunnel Louis-Hippolyte-Lafontaine et les autres endroits à circulation restreinte. Et cela n’est pas simple !

Certains fabricants de VR, voulant sans doute être mieux compris de leurs clients, choisissent d’inscrire la masse ou le volume réel de propane qui peut entrer dans le réservoir lorsque celui est rempli au maximum autorisé, soit 80 % de sa contenance en eau. À l’opposé, d’autres, comme Winnebago, précisent que le volume de leurs réservoirs témoigne de sa capacité totale en eau. À l’exception de quelques VR fabriqués au Canada, ces renseignements sont affichés en livres ou en gallons étasuniens.

Malheureusement pour le caravanier québécois, cette façon de faire ajoute un cran de plus à sa confusion puisque non seulement ce que lui apprend la fiche signalétique n’est pas pas exprimé en litres, mais en livres ou en gallon, alors que la norme à ne pas dépasser dans certains tunnels québécois réfère au volume total de la bonbonne remplie d’eau tout en étant exprimée en litres seulement. Quel fouillis !

Pour simplifier, sachez que si un fabricant affirme que le réservoir de son autocaravane contient plus de 9,7 gallons étatsuniens ou plus de 41 livres de propane alors qu’un autre, basant son calcul sur le volume total en eau, affiche plus de 12,65 gallons étatsuniens ou plus de 100 livres, il serait sage et surtout moins risqué pour votre portefeuille d’emprunter un autre chemin.

Note: Je fais un rappel à ceux qui désirent me contacter pour un commentaire ou une question ne se rapportant pas directement au sujet de ce billet. Veuillez, s’il vous plait, utiliser l’adresse qui suit : plaquerre@campingcaravaningmag.ca. Je me ferai un plaisir de vous répondre.