Pelleter ses problèmes dans la cour du voisin
Comme il fallait s’y attendre, le sujet abordé sur ce blogue la semaine dernière a suscité plusieurs réactions. Cependant, il est toujours difficile de déterminer avec précision et certitude les impacts d’un texte avant qu’il ne soit publié ou mis en ligne.
Prévisible, la nature des commentaires formulés par les lecteurs de mon blogue ne m’a pas vraiment surpris. Chat échaudé craignant l’eau froide, je me préoccupais davantage de la réaction de certains concessionnaires de véhicules récréatifs dont le niveau de tolérance de toute dissonance pouvant créer un effet négatif sur les ventes est habituellement très bas. Pourtant, il n’en fut rien, bien au contraire.
Imaginons un instant un client qui entre dans un commerce spécialisé en pâtisseries de tous genres pour acheter un pain. En rupture de certains éléments essentiels à la confection de ses pains, le boulanger lui propose alors de lui vendre les ingrédients qu’il a en main et, par exemple, de lui livrer un peu plus tard la levure qui lui fait défaut. « Il vous suffira d’intégrer la levure à la préparation, de le laisser gonfler et de le pétrir à quelques reprises avant de le mettre à cuire. »
Quelque peu hébété de la réponse du boulanger, le client revient chez lui en possession des ingrédients de la recette, à l’exception de la levure. N’ayant pas à sa disposition les outils dont dispose le boulanger et encore moins son expérience ni son savoir-faire, il redoute un peu que son pain ne soit pas aussi succulent qu’à l’habitude.
Actuellement, les concessionnaires de VR se retrouvent dans une situation présentant une grande similarité avec celle que je viens d’évoquer. Les constructeurs de VR américains n’ont aucune gêne à leur fournir des véhicules auxquels ils manque des morceaux. Portes d’armoires, quincaillerie, accessoires et appareils de toutes sortes en rupture de stock, la seule chose ayant de l’importance aux yeux du fabricant est de voir le VR, fini ou non, sortir de son inventaire. On ne pourrait mieux illustrer le concept québécois « pelleter en avant ». Les géants américains refilent leurs problèmes à quelqu’un d’autre, en l’occurrence le concessionnaire.
Car, c’est vraiment de cela dont il s’agit. Leur entreprise listée en bourse, ces bonzes de l’industrie n’ont qu’un objectif : présenter aux actionnaires un rapport trimestriel ou le volume des véhicules livrés est à la hausse. Cette obsession de séduire les investisseurs et d’augmenter la valeur de l’action en bourse justifie toutes les stratégies, peu importe que la qualité et la fiabilité des VR passent à la moulinette.
Cette course effrénée au rendement n’est pas sans indisposer les concessionnaires. Comment expliquer à un acheteur impatient, rêvant d’un peu d’évasion pour oublier les contraintes de la pandémie, qu’il lui est impossible de prendre possession du véhicule qu’il voit dans l’enclos du concessionnaire parce qu’il lui manque des morceaux ?
Seul point de jonction avec le client acheteur, le concessionnaire doit absorber toute cette pression et faire face à l’insatisfaction de consommateurs à la mèche courte. Cette donnée ne figurant nulle part dans le rapport financier trimestriel présenté aux actionnaires, c’est comme si elle n’existait pas ou n’avait aucune importance pour le constructeur.
Pis encore, les géants de l’industrie n’ont aucun remords à resserrer les mâchoires de l’étau dans lequel sont retrouvent les concessionnaires et ces derniers sont plutôt mal placés pour se plaindre. De plus, lorsque la fin du trimestre approche, les appels se multiplient pour que les concessionnaires viennent récupérer le plus grand nombre possible de VR, que leur assemblage soit complété ou non. Les véhicules doivent absolument quitter la cour du fabricant avant que la date fatidique n’arrive.
Pourtant, le concessionnaire peine déjà à composer avec un personnel réduit dans son atelier de service et à répondre à toutes les demandes touchant l’entretien régulier des véhicules de sa clientèle. Au Québec, la saison du caravaning est courte et les mois d’été constituent la période de pointe des demandes d’entretien. Ajoutons en plus que le commerçant doit en même temps affecter ses employés les plus expérimentés pour compléter l’aménagement des VR laissé en plan par le constructeur.
Certes, la vente de véhicules récréatifs représente un secteur d’activité très rentable. Je suis pourtant persuadé que plusieurs commerçants doivent mal dormir, confrontés qu’ils sont par leurs problèmes de gestion du personnel et leur désir de satisfaire leur clientèle. En cette période de fortes turbulences, pour rien au monde, je n’aimerais me retrouver dans leurs souliers.
Votre texte de ce matin ne me surprend pas, la même chose se produit en automobile. Avant l’arrivée de nouveaux modèles les fabricants vident leurs cours de triage pour recevoir les nouveaux modèles obligeant les concessionnaires à acheter leur part des surplus d’inventaires des cours de triage. Décrottez-vous le nez pour les mettre en kèk part.
Le problème est encore pire en VR. Comme vous dites les VR sont plus souvent qu’autrement non-finis, grrr….
Avec le reportage qui démontrait clairement comment les VR sont mal construits et avec la pénurie de pièces qui se rajoute et bien je ne suis pas sûr que c’est très sage de s’acheter un VR neuf dans ce contexte.