Pauvre Robidoux
Depuis une semaine, nous sommes à Rancho Jurupa, un des six parcs du comté de Riverside. Celui-ci est le plus près de Los Angeles. Ici, c’est la banlieue de Los Angeles, même si cette ville est à plus de 130 km de Riverside. Jamais, au Québec, il ne me viendrait à l’idée de prétendre que Trois-Rivières est en banlieue de Montréal. Mais nous sommes aux États et ici tout est tellement plus « big’stie ».
Depuis notre visite précédente, en 2008, ce parc a beaucoup changé. De multiples travaux d’aménagement y ont été réalisés, une seconde boucle de camping s’est ajoutée à la première. Au total, le camping comporte près de 150 d’emplacements, dont une trentaine avec trois services. Je devrais dire quatre, car, bien que pas très fort, le signal wi-fi du parc est accessible de notre emplacement.
Du lundi au jeudi, ce parc honore la carte Passport America. Du vendredi au dimanche, il faut payer plein tarif, 25 ou 35 $ selon la boucle choisie. Plus chère, Cottonwood, la dernière boucle aménagée, permet aux caravaniers de stationner leur VR sur une dalle de béton pleine grandeur. Entre les emplacements, le chemin est complètement asphalté.
Nous avons opté pour la boucle Lake View, plus ancienne certes, mais possédant un caractère plus rustique et campagnard qui tranche avec la grande ville qui nous entoure. Juste derrière l’Alto, un lac de 1,25 hectare propose ses truites aux pêcheurs du dimanche. Tout autour du lac et sur le camping, lièvres, oies et canards s’occupent de l’animation.
À moins d’un kilomètre de la sortie du parc, nous entrons dans Rubidoux Village. Si nos voisins n’écrivaient pas les mots aux sons, ils auraient su qu’il faut écrire Robidoux, car, ce coin de pays fut développé par un Québécois du nom de Louis Robidoux. Lui et ses cinq frères faisaient partie des coureurs des bois qui ont arpenté toute l’Amérique du Nord.
Ce même Louis Robidoux a été à l’origine du développement de ce qui est devenu par la suite Riverside au milieu des années 1800. D’ailleurs, son domaine s’appelait Rancho Jurupa, comme le parc où nous sommes. À l’est du parc, une colline porte le nom de Mount Rubidoux.
Bien sur, ici, très peux de personnes connaissent les origines des frères Robidoux. À la guérite du parc, où je discutais de la question avec le préposé, celui-ci m’avoua candidement qu’il ignorait ce fait. Pour lui, ses connaissances se limitaient à savoir que Rubidoux avait été un homme d’affaires important. Il était cependant incapable de me dire dans quel secteur des affaires il avait oeuvré. Vous devinez que lorsque j’ai mentionné le mot Québec, j’ai dû lui expliquer que le Québec était juste au nord des États de New York, du Vermont et du Maine. Pas fort fort en géographie le bonhomme !
Comme bien d’autres Québécois qui ont joué un rôle important dans le développement de ce qui est devenu les États-Unis, Louis Robidoux n’a pas eu la reconnaissance qu’il méritait. D’un côté, le clergé québécois voyait d’un très mauvais oeil que ces coureurs des bois en quête de liberté et d’aventure échappent à leur contrôle. Il n’était donc pas question de vanter leurs exploits de peur que d’autres voulant les imiter délaissent le pouvoir de la soutane.
À l’extérieur du Québec, ceux qui ne parlaient pas français désignaient ces explorateurs comme des « Frenchmen ». Cela a également eu pour effet de créer une équivoque. D’ailleurs, un Français, de France comme on dit, établit à Riverside depuis plus de quinze ans et rencontré par hasard à l’épicerie croyait dur comme fer que Louis Robidoux venait du même pays que lui, induit en erreur par le qualificatif « Frenchman ». Même après plusieurs minutes de discussion avec lui, je percevais encore dans son regard un doute sur la véracité de mes propos.
Pauvre Robidoux, puisse l’ambiguïté qui règne sur ton nom et ton origine ne pas t’empêcher de reposer en paix. Grâce à ton audace et tes exploits, sache que lorsque je viens à Rancho Jurupa, j’ai un peu l’impression d’être sur les terres d’un cousin lointain et d’y retrouver un peu de mes racines québécoises.
D’autres détails sur Wikipedia:
http://en.wikipedia.org/wiki/Louis_Rubidoux
Ce qui est écrit sur Wikipedia n’est que la responsabilité de l’auteur du texte, on ne peut donc pas être certaine à 100% de la véracité des dires. Louis et son frère Joseph Robidoux viennent d’Europe comme la majorité des Québécois, mais il est écrit qu’il est de nationalité américaine. Il a l’air d’avoir épousé une américaine. Très peu sur son enfance au « Canada français ».
Pour ce qui est de la connaissance en géographie de certains américains, c’est pire encore. En expliquant que le Québec se situait au nord des États de New York, Vermont, Maine… je me suis rendu compte que mon Texan ne savait pas où étaient ces États de son pays non plus.
Ça fait réfléchir sur la valeur de nos démocraties…