Nouveau-Brunswick / Baie de Fundy
St-Andrews by-the-Sea révèle ses charmes, mais cache ses baleines…

Au départ d’une excursion aux baleines sur la baie de Passamaquoddy, dans l’embouchure de la baie de Fundy, la fine brume court encore aux abords des nombreuses îles du secteur. Déjà, notre guide nous laisse entendre que les baleines risquent d’être rares.
Habillés chaudement des grands habits de flottaison Mustang, nous écoutons patiemment l’oraison du propriétaire de Fundy Tide Runners qui prépare le terrain à une sortie sans révélation mémorable. C’est qui ne signifie pas qu’elle risque de s’avérer sans intérêt, j’en suis certain.
Une multitude d’îles

Déjà, dès le départ à bord du pneumatique, l’ambiance feutrée qui règne sur la mer est empreinte de magie. Je ne peux que m’émerveiller de l’extrême abondance des îles, grandes et petites, qui émergent du brouillard. Les trois principales : Deer Island, Campobello puis Grand Manan, méritent qu’on s’y attarde. Il faut absolument prévoir y débarquer quelques jours dans le cas de Deer Island et Grand Manan et au moins une journée sur Campobello. Pour ce faire, on emprunte les traversiers ou les bacs qui les desservent à partir de Back Bay et Blacks Harbour. À elle seule, la traversée est une aventure…
La plus rapprochée, Deer Island, reste la plus pittoresque. On y élève le saumon et on y conserve le homard dans des viviers. Près de son camping, on observe aussi le plus grand remous marin du monde : Old Sow Whirpool.
La plus éloignée et la plus populaire, Grand Manan, est la digne héritière de la culture hippie qui y a amené le développement des activités de plein air, le respect de la nature et la culture du « dulse » fait à partir d’algues et préparé en croustilles ou en condiment culinaire. Le site du Whole-In-The-Wall, dans Whale Cove, est un incontournable pour les kayakistes.
Quant à Campobello, l’île est canadienne, mais elle est reliée à Lubec, aux États-Unis, par un pont alors qu’il faut prendre le traversier de Deer Island pour y accéder du Canada. L’expérience du bac et du débarquement sur la plage vaut cependant le coup. Campobello est surtout connue à cause de la maison d’été de l’ex-président américain Franklin Delano Roosevelt qu’on peut y visiter.
Baleines en vue !
Le pneumatique de Fundy Tide Runners frôle les rives, les quais, les villages et les phares que l’écran laiteux enveloppe de mystère. Celui de Head Harbour, à la pointe nord-est de Campobello, est le plus photographié du Nouveau-Brunswick. Et pour cause puisqu’il a fière allure avec ses bâtiments et sa grande croix rouge qui bénit la brume épaisse.

La vie exulte dans ce milieu marin remué par la rencontre des eaux de la rivière Sainte-Croix qui afflue non loin et le puissant reflux de la marée. Près de 370 espèces aviaires ont été reconnues sur Grand Manan. Les oiseaux marins se comptent par dizaines de milliers. De véritables nuées de goélands, cormorans, pluviers, pétrels et autres se posent sur une mer grouillante d’une nuée de harengs qui se bousculent en surface.
Les phoques sortent la tête, impassibles bien que curieux. Les pygargues surveillent la scène en planant au-dessus de l’action. J’en remarque quelques-uns qui se posent sur les rochers du rivage pour engloutir leurs captures. Je photographie même un pygargue adulte et un immature posés côte à côte sur des masses d’algues.
Petits rorqual et marsouins pointent le dos subrepticement. Mais la baleine la plus convoitée des 12 espèces qui croisent dans le secteur, la Franche, ne se montre pas. Ce qui est un peu normal puisqu’il ne reste plus que 400 à 500 spécimens de cette espèce décimée par la chasse, mais qui connaît maintenant un lent recouvrement grâce aux mesures de protection qui contribuent surtout à éviter les collisions avec les navires. Soixante d’entre elles ont été vues le même jour en septembre dernier.
Jardin Kingsbrae

Nous serons largement consolés de la déception de ne pas avoir vu de grandes baleines avec la visite du magnifique Jardin Kingsbrae et la rencontre de son âme dirigeante, Andreas Haun.
Avec toute la passion qui caractérise les horticulteurs, il nous fait parcourir les 27 acres de cet univers coloré et odorant où les roses éclatent au milieu des rudbeckias qui pavanent. Quelque peu inspiré des Jardins de Métis, les terrasses du Kingsbrae sont parsemées d’œuvres d’art éclectiques, présentées dans le cadre d’un concours annuel. Un grand orignal de métal… Un lapin et un renard sautant par-dessus un arbre… Bustes et représentations réalistes côtoient des œuvres abstraites ou amusantes qui suscitent immanquablement les réactions.
En réunissant des styles nouveaux et anciens, en art comme en horticulture, le Jardin Kingsbrae rend hommage au patrimoine de jardins exceptionnels de St-Andrews. Les visiteurs retrouvent ces grandes traditions entre autres dans le jardin blanc, la roseraie, le jardin de style victorien, le jardin des plantes vivaces et celui de la maison de campagne. Le jardin rocailleux, le jardin des plantes comestibles, des fleurs sauvages, le jardin secret et celui des graminées reflètent un style de jardinage plus moderne.
Les conifères de collection et arbres rares suscitent aussi l’intérêt des connaisseurs. Le plus remarquable de ces végétaux date de l’époque jurassique. Un vrai « fossile vivant » selon Andreas Haun qui a dû le mettre en cage tant il est précieux. Il s’agit de l’un des arbres les plus vieux et plus rares au monde, un wollemia nobilis, et le premier au Canada. Cet historique pin Wollemi, vieux de 200 millions d’années, a dû franchir 16 500 km, depuis l’hémisphère sud jusqu’à la petite station balnéaire St Andrews.
La visite du Jardin Kingsbrae est parsemée de surprises pour les petits et les grands qui apprécient également son charmant café, sa galerie d’art et son centre de jardinage.

Infos :
Jardins Kingsbrae : kingsbraegarden.com
Fundy Tide Runners : fundytiderunners.com