Monument Valley… un des moments forts !
Sur la route de Page à Monument Valley, le panorama nous prépare progressivement à ce que l’on découvrira comme environnement au Monument Valley Navajo Tribal Park. Peu à peu, le désert se dessine et les formations rocheuses effilées commencent à s’élever à l’horizon, comme des doigts d’honneur au temps qui fuit.
Toutefois, nous devons affronter un vent à écorner les mouflons, qui nous bouscule sur la route. Le vent se transformera en amorce de tempête de sable. Ce à quoi il faudra ajouter des pluies violentes qui mettront passablement d’ambiance au trajet routier.
Lorsque nous arrivons à la guérite du parc, le gardien ouvre rapidement sa fenêtre en gueulant pour ramasser le 20 $ de droit d’entrée et nous hurle presque de retourner chez nous puisque tout est fermé. Durant ce court épisode, il se met du sable plein les dents et de l’eau plein la cabane.
Nous poursuivons quand même jusqu’au camping où nous avons une réservation pour un soir, que je porte tout de suite à deux puisque, pensais-je, il n’y aura rien à foutre aujourd’hui même si nous ne sommes qu’en début PM.
Décevant et spectaculaire

C’est le camping le plus cher du voyage à ce jour : 42 $ US sans aucun service. Il n’y a même aucune opportunité de s’approvisionner en eau et aucune installation de vidange. On souhaite donc que notre réserve d’eau suffise pour 3 jours. Heureusement, il y a des toilettes avec douches et des poubelles. Le site, toutefois, est parmi les plus spectaculaires qui se puissent. Les VR sont stationnés en ligne sur un stationnement dénudé, dont les espaces sont délimités par les tables de pique-nique bien ancrées au sol. Devant nous, les trois massifs rocheux les plus mythiques des USA et peut-être du monde. Ceux qui ont marqué l’imaginaire de générations en figurant dans les grands classiques du cinéma western et des films de John Wayne : West Mitten Butte, East Mitten Butte, Merrick Butte et Elephant Butte plus en marge. On les a en pleine face et on mange dans le VR en les contemplant.
Les temps changent à une vitesse ahurissante ici et, finalement, les choses se tassent passablement. Nous avons le temps de faire un tour au grand hôtel The View qui était sur le point d’être inauguré lors de ma première visite ici il y a un peu moins de 10 ans. Super belle boutique d’art autochtone, vendeuses qui baillent aux corneilles et musée intéressant sur les Talkers Navajo.

D’ailleurs, je reviens un peu sur notre route avant d’arriver au parc. Le musée le plus complet sur les Talkers Navajo logeait jadis dans le Burger King de Kayenta, propriété d’un ancien Talker, ces militaires Navajo qui ont grandement contribué à la victoire américaine sur les Japonais dans la guerre du Pacifique, en utilisant leur langue dans les communications codées. Ce qui a complètement déjoué l’adversaire. Depuis mon premier passage ici et ma rencontre avec ce personnage, le Burger King a été revampé et, à l’exposition qu’il présente toujours, on a ajouté un petit musée à l’extérieur, le Navajo Shadehouse Museum, gratuit et fascinant à visiter.
De retour au parc, comme le temps se plaçait, nous sommes partis sur le sentier de rando qui fait le tour de West Mitten Butte en près de 7 km. Un parcours très agréable qui nous livre toutes les perspectives sur le légendaire rocher avec son aiguille détachée de la masse.

Le lendemain, nous voulions faire la boucle de la Valley Road, qui fait 21 km et qui nous fait entrer dans la vallée pour découvrir d’autres magnifiques formations rocheuses, dont les 3 Sister, trois aiguilles grandioses. Malgré l’interdiction d’emprunter ce chemin non pavé en VR, j’avais quand même le goût de m’y risquer, comptant sur l’expérience aguerrie de notre vieux compagnon de route.

L’idée lumineuse nous est cependant venue de le parcourir en vélo, ce que personne ne semble faire. On fait ce circuit avec sa propre voiture ou dans les véhicules des voyagistes locaux. J’étais heureux de profiter de mon vieux DeVinci Vandal tout terrain, un des premiers modèles aluminium DeVinci que j’ai depuis plus de 30 ans et qui roule comme un neuf. Joanne, avec son hybride, avait plus de difficulté, mais sa détermination a compensé. Nous avons réalisé une super tournée du circuit, les gens nous saluant et nous applaudissant au passage. Les panoramas sont extraordinaires tout au long de la piste et il n’y a qu’au dernier km, avec la remontée au plateau supérieur, que la difficulté s’est manifestée. D’autre part, nous avons été très heureux de ne pas nous y être aventurés avec le VR puisque, dès le départ, les Navajos gardent la pente la plus importante non entretenue, où se sont creusés des cratères qui auraient littéralement détruit le camper. C’est leur façon de faire.
En fin de journée, nous n’avons malheureusement pas eu droit au coucher de soleil qui enflamme les buttes, mais le spectacle était quand même superbe. L’ambiance du camping est gâchée par le fait que la circulation automobile n’y est aucunement contrôlée et que toute la réserve vient y virer en pick up en plus de nombreux visiteurs curieux. On n’y contrôle pas non plus l’usage des génératrices dont certains locateurs de VR inexpérimentés abusent largement. Les campeurs en tente disposent de places de choix avec une vue imprenable sur la vallée.

Ce matin, Joanne a réussi à me faire lever à 5 h 30 pour assister au fabuleux spectacle du lever de soleil derrière les buttes. Une splendeur visuelle qui valait que je m’arrache du lit.
Je ne peux malheureusement que déplorer l’attitude des Navajos, dont la directrice de l’hôtel, qui m’a refusé un entretien parce que le parc n’a pas besoin de publicité. Ce qui n’était pas le cas quand j’ai été invité ici il y a 10 ans pour l’ouverture prochaine de l’hôtel. Son attitude reflète un mélange de suffisance, d’inexpérience, de manque de vision, d’absence d’initiative et d’entrepreneuriat. Heureusement que les Innus du Québec, qui ont bâti des entreprises extraordinaires comme l’Hôtel des Premières Nations à Wendake, ne sont pas restés assis sur leur bonne fortune comme les Navajos. Et puis, comme je l’ai constaté ultérieurement, tous les Navajos ne sont pas à mettre dans le même sac… À suivre.