Moab et sa faune
Je poursuis aujourd’hui mon récit sur les grands parcs nationaux de l’Utah. Après Zion et Bryce, nous nous sommes dirigés vers Capitol Reef. Un peu moins connu, ce parc possède néanmoins une personnalité qui le distingue des deux autres.
Longtemps avant qu’il ne devienne un parc national, Capitol Reef fut colonisé pas quelques familles de mormons désireuses de s’établir dans un lieu où elles pourraient facilement contrôler leur environnement en harmonie avec leurs valeurs religieuses. À force de travail et de persévérance, ces colons réussirent à irriguer et à cultiver un sol aride pour en faire jaillir des vergers remplis de fruits variés.
Bien qu’aujourd’hui, seulement quelques vestiges de leurs habitations subsistent encore, ceux-ci confèrent un caractère unique à ce parc. Contrairement aux autres environnants, où falaises, précipices et rochers constituent l’attraction, ici, c’est l’aventure humaine et son action pour transformer le milieu qui devient la raison d’être du parc. En s’y promenant, on parvient à imaginer à ce que fut la vie de ces pionniers et leur isolement du reste du monde. Je crois que pour la majorité des gens d’aujourd’hui, il serait impensable de retrouver un tel mode de vie, privé de tout le confort auquel la vie moderne nous a habitués.
Cependant, comme tous les autres qui pullulent l’Utah, ce parc comprend son lot de trésors géologiques naturels. En utilisant d’est en ouest la route 24, la traversée de Capitol Reef est relativement courte, d’autant plus que la plus grande partie de ce parc est dans un axe nord-sud. Étant sur notre retour vers le Québec, donc en direction est, nous avons continué sur la route 24 après le parc. Avant de rejoindre la I-70, plus au nord, cette route permet aux visiteurs de contempler de nombreux rochers aux teintes rougeâtres, plus majestueux les uns que les autres.
Après quelques kilomètres sur l’Interstate, nous avons orienté le nez du Jeep en direction de Moab ou nous avions décidé d’établir notre camp de base pour aller voir deux autres parcs Nationaux: Canyonlands et Arches. En arrivant à Moab, une affiche disant « Jeepsters Welcome to Moab » me fit sursauter. Wow! dis-je à Michelle, on dirait qu’ils s’attendaient à notre visite. Que non, l’affiche s’adressait à des dizaines et des dizaines de propriétaires de Jeep comme j’allais rapidement m’en rendre compte. Jamais de ma vie, je n’avais suivi, rencontré, vu autant de Jeeps.
À la première occasion, je m’informe pour savoir s’il y avait un rassemblement quelconque d’un club de Jeep. Non, que je me fais répondre, c’est simplement que nous sommes en avril et comme chaque année, avril et mai sont les deux mois de l’année où il y a le plus d’activité ici. Effectivement, l’information que l’on venait de me transmettre était juste. Il régnait dans cette petite ville une activité touristique hors de l’ordinaire. Les terrasses des restaurants débordaient, les gens déambulaient sur les trottoirs comme des fourmis, bref il était clair que la saison touristique était commencée.
Dans les jours qui suivirent, je compris que Moab avait depuis longtemps mis de côté son statut de ville minière. La fin de la guerre froide ayant mis fin à la course à l’armement nucléaire, l’uranium qui faisait la fortune de la ville avait vite vu sa valeur baisser. Heureusement, Moab sut miser sur d’autres ressources. Située dans une faille de l’écorce terrestre, les caps de roches qui l’entouraient allaient vite devenir le rendez-vous idéal pour les amateurs de balades en quatre roues motrices en dehors des sentiers battus.
Avec les années, Moab, Utah s’est sans doute mérité le titre de la capitale des sports extrêmes. Outre les ballades à Jeep, on peut y faire de l’escalade, descendre les eaux agitées du Colorado en canot pneumatique, sauter en parachutisme, planer en parapente, du vélo de montagne ou, tout simplement lorsque l’on a atteint un âge comme le mien, de magnifiques marches dans cette nature sauvage.
À moins de cinq kilomètres de Moab, se trouve le parc national Arches. Comme son nom l’indique, des arches de pierres et des rochers défiant les lois de l’équilibre parsèment ce lieu. Dès que l’on quitte la route, passé le centre d’accueil, le chemin se met à grimper vers le ciel. Des courbes en épingles élèvent l’altitude de plusieurs centaines de mètres en seulement quelques kilomètres. N’ayez crainte, rien de dangereux, même si nous, Québécois, habitués à la plaine devons surmonter un certain inconfort. Soyez certain qu’après avoir circulé dans les canyons de l’Utah et les Rocheuses, plus jamais vous n’emploierez le mot montagne pour désigner les collines de Charlevoix.
Le jour suivant, nous avons pris le chemin de Canyonlands, situé à environ 60, 70 kilomètres de Moab. Cette fois-ci, nous nous sommes retrouvés sur une Mesa, qui signifie plateau. Le bord de falaises donnant sur les ravins donnait l’impression d’avoir été coupé au couteau, comme si le relief terrestre s’était fracturé d’un coup sec pour se retrouver des centaines de mètres plus bas.
Tout au fond des ravins, des chemins de terre, si loin qu’ils avaient l’air d’un fil. Pourtant, en observant attentivement, on pouvait, à l’occasion, y débusquer un 4X4 pas plus gros qu’une auto sortie d’une boite de céréales soulevant un nuage de poussière.
Un peu plus loin, le chemin se mettait à grimper à même le cap de roche comme un lacet de bottine. Des cyclistes aux mollets de béton s’esquintaient à vouloir atteindre le sommet. Un peu plus paresseux mais tout aussi téméraires, des types chevauchant des motocross faisaient révolutionner leurs moteurs au son de guêpe. D’évidence une conclusion s’imposait: les animaux sauvages ne sont pas la seule faune à apprécier ces lieux.
Est-ce à dire que je ne pourrai pas me promener sur ces routes avec mon classe B de 19 pieds?
Bonjour!
Tu peux t’y promenner… sans crainte!!
Mathieu