L’art de manier la baguette
Alors que pour plusieurs de nos compatriotes, ce dimanche marque le dernier jour de leurs vacances annuelles. Souvent, la tête pleine de beaux souvenirs, ils puisent dans cette douce énergie, la force nécessaire pour reprendre le collier et retrouver leur environnement de travail en commençant déjà à échafauder des projets pour le prochain long weekend.
Bien que la retraite fait disparaitre les notions habituelles de congés, de vacances et de travail, il n’en reste pas moins que mes semblables s’obstinent souvent à continuer d’utiliser le mot vacances pour l’associer à leurs périples d’été. Il ne faut pas leur en vouloir, après tout, ils ont longtemps jonglé avec ce concept depuis leur première année d’école. Aujourd’hui, toutefois, lorsqu’ils utilisent ce mot, il font surtout référence à l’esprit des vacances, le seul qui soit vraiment important.
Je n’échappe pas à cette réalité, d’ailleurs, je suis à compléter une virée qui nous a menés, Michelle et moi, jusqu’à l’Île-du-Prince-Édouard, incluant l’irremplaçable tour de la Gaspésie, répété au moins une trentaine de fois depuis notre voyage de noces, en 1966. Certes, avec les années, nous avons élargi nos horizons et je dois avouer que nous trouvons la côte Acadienne de plus en plus sympathique et relaxante.
Il y a moins de deux semaines, nous séjournions au camping municipal de Caraquet, renommé Colibri sur mer. Fidèles à notre habitude, nous nous étions présentés à l’improviste et n’avions éprouvé aucune difficulté à obtenir un emplacement. Il faut dire que le gabarit et l’autonomie de notre actuel VR nous libèrent de l’obligation de requérir un emplacement avec services.
Même les inégalités du sol ou sa pente ne représentent pas un obstacle significatif. À cet égard, j’apprécie de plus en plus les béquilles hydrauliques qui, automatiquement, au toucher de deux boutons, prennent en charge la corvée de la mise à niveau. Un système sans casse-tête ni sueur dont j’ai déjà parlé dans un récent article de Camping Caravaning.

Quatre jours consécutifs, nous avons renouvelé notre bail avec cet emplacement encadré de deux magnifiques sapins adultes, cela même si d’autres, avec services, nous faisaient de l’œil. D’un côté, l’eau calme d’une rivière coulant vers la Baie-des-Chaleurs, de l’autre, caché derrière le boulevard Saint-Pierre, une longue piste cyclable, agréable à souhait, qui, en direction est, mène presque jusqu’à l’île de Miscou alors que vers l’ouest, elle pointe vers Bathurst. Comme il s’agit d’un ancien tracé de chemin de fer, le dénivelé y est négligeable.
C’est justement lors d’une balade à vélo que nous nous sommes arrêtés à la boulangerie-café Grains de Folie. Pendant que Michelle garde un œil sur nos montures, j’entre acheter une miche de pain encore chaude. Devant moi, un couple attend de recevoir le gouter commandé. La dame ayant opté pour un bol de café au lait, le barista s’affaire à le lui préparer.
Aprèsa voir versé le lait chaud et le café dans la grande tasse, il couronne le tout de deux cuillères de crème épaisse à souhait. Puis, il sort une petite baguette de bois comme celle dont on se sert pour enfiler viande et légumes en brochette et étend la crème en la touchant de la pointe de sa baguette.
Comme je regarde par-dessus l’épaule de la dame, son manège me semble étrange. Toutes les deux, trois secondes, le barista lève les yeux vers ses clients et reprend son manège en effleurant la crème. Intrigué, je me demande s’il cherche, discrètement, mais sans succès, à enlever une mouche à fruit ayant revendiqué sa ration de crème. Même bref, le regard du barista vers ses clients me semble par trop insistant.
Le manège continue ainsi pendant quatre à cinq minutes. À la fin, le barista, tout sourire, tend le bol à café à la dame (voir photo). Sur le dessus flottent deux ilots de crème évoquant avec fidélité les têtes du couple. C’est à ce moment que j’ai compris que la baguette utilisée par le barista n’avait aucun rapport avec des brochettes, il s’agissait plutôt d’une baguette magique.

Pourquoi vous ai-je raconté cela ? Tout simplement pour respecter l’esprit des vacances et des découvertes aussi inattendues que magnifiques qui surgissent sur notre route. Je suis persuadé que chacun d’entre vous pourrait m’en citer plusieurs les ayant marqués. Allez, laissez-vous aller et contribuez à prolonger les vacances.
Merci pour la légèreté de l’article, il définit bien le terme »vacances ».
Bonne continuité à vous deux
Très habile cet artiste du café. J’ai déjà consulté une artiste qui m’a lu mon avenir dans une tasse de feuilles de thé. Son talent était proportionnel à l’épaisseur de mon porte-feuille. J’ai donc su ce qui m’arriverait dans la semaine suivant la “consultation”.
WOW! Que de talent et quelle belle surprise! C’est toujours ce que je dis aussi, ce n’est pas parce qu’on est à la retraite qu’on est en vacances. Il faut sortir de son quotidien, sa routine, se mettre en mode découverte mais également slow life, slow travel, pour moi, c’est ça les vacances! Il n’y a rien que j’aime plus que de me laisser surprendre par quelque chose à laquelle je ne m’attendais pas. Une fois, à Savannah, nous déambulions quand nous sommes tombés sur une exposition de Dessins à la craie en 3 D, un Chalk Festival, c’était la première fois que je voyais de telles oeuvres, j’avais trouvé cela tellement magnifique!
J’ai le goût de relater une autre surprise au hasard des vacances, il y en aurait tant à raconter! Un automne où nous étions en Floride à Nokomis. Nous parcourions la piste cyclable Venitian Waterway quand nous avons vu des gens qui installaient des rubans délimitant des espaces, d’autres y déposaient des chaises. On arrête demander à une dame qui venait du Nouveau-Brunswick et elle nous explique que ce soir, c’est la Boat Parade de Noël à la nuit tombée. On y revient en vélo, vers l’heure du souper, avec couverture sur l’herbe, saucisson, fromage, craquelin et demie-bouteille de vin. L’atmosphère est super sympathique, conviviale, il y a des familles, des BBQ, des jeux, de la musique…on s’imprègne de cette douce soirée et on s’y sent bien! La parade de bateaux avec toutes ces lumières qui se reflètent sur l’eau fut tout simplement magique!