La monotonie des arbres
Ça y est, officiellement, notre périple est terminé, du moins en ce qui concerne le Skyline Drive et le Blue Ridge Parkway. Nous ne sommes pas revenus au Québec pour autant. Ce ne sera pas avant au moins deux jours. Quoi qu’il en soit, voici quelques commentaires sur les deux parcours évoqués.
Première impression, ce sont deux routes, la plupart du temps en forêt, avec beaucoup de montées, de descentes et de courbes. Comme je le disais précédemment, pas de quoi s’inquiéter, même avec un très gros VR. Un peu plus d’attention et de prévoyance qu’à l’accoutumée suffisent à garantir une ballade sans problème.
Ces deux trajets font partie des routes mythiques qui font rêver. Ils touchent beaucoup l’imaginaire de nos voisins pour qui, route rime avec liberté. Pourtant, ce ne sont que deux routes. Tranquilles certes, sans circulation ni embouteillages, mais qui, à la longue, peuvent devenir monotones. Après tout, rien ne ressemble plus à un arbre qu’un autre arbre.
Pour qui aime les paysages forestiers, les points de vues panoramiques, ces deux routes constituent un régal. Toutefois, si belle soit-elle, une route n’est rien d’qu’un chemin asphalté. Mis à part les nombreux points de vue sur les montagnes environnantes ou les vallées en contrebas, les tables à pique-nique et les sentiers de marche, il ne s’y passe pas grand-chose. Tellement rien en fait, que souvent, les automobilistes se saluent de la main, à la façon de deux randonneurs se croisant dans un sentier isolé.
La limite de vitesse fixée à 72 km/h est très difficile à outrepasser, exception faite des rares moments où l’on se retrouve dans une vallée. En soi, cela constitue un avantage, car on ne sait jamais à quel moment un cerf (de Virginie, bien sûr) décidera d’aller brouter le feuillage d’un arbre situé de l’autre côté de la route. Il fut donc constamment être aux aguets de ces charmants « Bambi ». D’ailleurs, le trajet est beaucoup plus agréable pour les passagers que pour le conducteur. À moins de s’arrêter sur le bord de la route, ce dernier n’a vraiment pas le temps de s’attarder à regarder le paysage se déroulant de chaque côté de lui. Il doit constamment regarder à l’avant.
Parcourir ces quelque 750 kilomètres à petite vitesse laisse beaucoup de temps pour penser. Ainsi, j’ai compris que, malgré toute sa beauté, un tel parcours ne constitue pas un intérêt économique important pour le milieu. Ce ne sont pas quelques bouteilles d’eau ou de thé glacé et les quelques menus souvenirs vendus dans les « Welcome Center » répartis sur la route que l’on peut qualifier de moteur économique régional. Certes non !
En fait, j’ai compris pourquoi Tourisme Virginie avait jugé important d’organiser ce voyage de presse. La route pittoresque constitue un moyen d’amener des visiteurs dans la région. Par contre, l’économie commence à rouler lorsque ces visiteurs quittent cette route. La route agit donc comme un leurre miroitant dans l’eau et qui attire le poisson. Le véritable défi consiste donc à amener ce poisson dans l’épuisette du pêcheur. Surtout, ne voyez rien de péjoratif dans mon exemple. Je l’ai utilisé pour démontrer la dynamique qu’il représente.
Malgré l’impression que cet exemple peut engendrer, je suis très heureux d’avoir fait ce périple et je trouve louable et inspirée l’intention de l’Agence du Tourisme de la Virginie de l’avoir organisé.
Tant que le visiteur se limite à rouler sur le Skyline ou le Blue Ridge, il se prive de toute une réalité fort dynamique cachée par la forêt. Il doit donc accepter de quitter cette route qu’il croyait l’objectif du voyage, pour s’ouvrir à une autre forme d’enchantement. Il peut alors passer de la beauté de la nature à celle des humains. Bifurquer lui fait connaître les gens qui vivent tout près, comprendre leur histoire, leurs valeurs. Il peut s’émerveiller de leur imagination et constater leur créativité. Voilà à mon avis le principal intérêt à parcourir le Skyline Drive et le Blue Ridge Parkway.
Vous doutez de la véracité de mon raisonnement ? En voici une autre démonstration. La première de ces deux routes est complètement située en Virginie. La seconde empiète pour une bonne part sur la Caroline du Nord. Or, le voyage de presse tel qu’organisé ne visait que la portion Virginie du Blue Ridge. Nous avions donc reçu une tonne de renseignements sur les communautés, les activités et les ressources environnantes. Voilà pourquoi cette partie du voyage nous est apparue si enrichissante.
Une fois traversée la frontière qui sépare les deux États, nous n’avions plus aucun document mettant en valeur ce qui se trouvait en Caroline du Nord. Ne sachant pas ce qui nous entourait et ses possibilités, nous sommes donc demeurés presque continuellement sur le Blue Ridge. Nous sommes conscients d’être passés à côté d’endroits et de choses qui nous auraient séduits. Mais bon, nous ne savions pas derrière quels arbres ces atouts étaient cachés. Ce dernier segment de notre parcours conserva le caractère bucolique de ce que nous avions vu précédemment, mais rien de plus.
Cet après-midi, alors que nous remontions vers le Nord sur la I-81, Michelle attirait mon attention sur chaque panneau publicitaire annonçant ici une caverne, là le Natural Bridge, ailleurs autre chose. Bref, des lieux que nous avions visités et qui s’étaient enracinés dans nos souvenirs. Ils étaient devenus significatifs. Dans quelques jours, nous aurons oublié que nos avons vu un arbre, cent arbres, milles arbres et beaucoup plus, par contre, des villes comme Shenandoah, Lexington, Roanoke, Salem, continueront de nous dire quelque chose.
Demain, changement de ton et de climat. Je vous raconterai mes mésaventures téléphoniques à l’étranger. J’espère d’ici là avoir réglé ce fâcheux contretemps et limité les dégâts.
J’ai déjà remarqué moi aussi que la Virginie travaille fort son tourisme. Beaucoup plus de documentation, de brochures, d’annonces sur cet état que celui de Caroline du Nord. Peu importe la route empruntée, la 81 ou la 95, on traverse la Caroline du Nord sans trop savoir où s’arrêter. Économiquement, ça doit être un état plus pauvre et nous donne l’idée qu’il a moins à offrir.
Il y a quelques provinces du Canada qui sont comme ça aussi!!!
Et quelques régions au Québec! Il y en a qui n’ont pas le tour ou n’y croit pas.
Comparaison avec Natchez Trace.
Le quel est le mieux, pareil ou non.
meland