Des VR victimes d’âgisme
Vous l’ignorez sans doute, mais les commentaires que vous publiez sur ce blogue sont d’une grande importance. En maintes occasions, ils m’amènent à voir les choses différemment ou encore à m’intéresser à un sujet qui aurait pu m’échapper.
Ce fut encore le cas cette semaine, quelqu’un fidèle lecteur, Michel Caron fit allusion au fait qu’un nombre croissant de campings imposent une limite d’âge aux véhicules récréatifs des caravaniers qui souhaitent louer un emplacement saisonnier. Son propos et l’intérêt qu’il suscita, piquèrent ma curiosité et m’amenèrent à réfléchir aux impacts d’une telle contrainte.
Oui, depuis quelques années l’imposition d’une date de péremption aux véhicules qui se présente au portillon des campings est en voie de devenir une tendance lourde chez nos voisins du Sud. Comme il fallait s’y attendre, au Québec et au Canada, l’implantation de grandes chaînes de terrains de camping a contribué à la propagation de cette norme.
Bien sûr, pour le moment, chez nous, le phénomène est encore limité et touche principalement les campeurs saisonniers sans trop écorcher ceux qui sont de passage. D’ailleurs, presque tous campings auxquels je faisais allusion dans mon billet de la semaine dernière s’étaient enquis de l’année de fabrication de mon VR.
Je peux comprendre qu’un propriétaire d’un terrain de camping, dans lequel il a investi beaucoup, notamment pour en rehausser les services et le rendre plus attractif, se soucie de l’image qui attendra les clients, de passage ou saisonniers. Comme en toute chose, il suffit de quelques secondes pour cristalliser la première impression que nous offre un terrain de camping.
Immédiatement, souvent même avant d’avoir franchi la barrière pour pénétrer sur les lieux, notre cerveau commence à se faire une idée du calme, de la beauté, de la propreté, de la superficie des emplacements et de l’intimité qu’il est possible d’y créer. Rapidement, presque inconsciemment et sans compromis, notre esprit jauge la qualité de l’atmosphère que l’on pourra y trouver et décide si celle-ci répondra à nos attentes. Par la suite, la décision d’y rester ou de repartir, une démarche plus rationnelle, permettra d’évaluer l’acceptabilité d’inévitables compromis.
Personnellement, en arrivant à la barrière de l’entrée, dès que j’entends de la musique tonitruante relayée par des haut-parleurs près de la piscine ou l’aire de jeu, que je croise des caravaniers aux choix musicaux discutables — habituellement moins la musique est belle, plus ils poussent le volume à fond —, qui m’imposent aussi leurs choix télévisuels sur un écran extérieur, j’ai tendance à faire demi-tour sur le champ.
Fixer un âge maximum aux VR autorisés sur son terrain, permet sans doute au propriétaire d’espérer rehausser l’image offerte par son établissement, une caractéristique probablement très recherchée par ses clients. Qui d’entre nous aspirerait à fréquenter un camping où des caravanes affichent une jupe de styromousse pour contrer l’humidité par temps frisquet, où cannettes et caisses de 24 jonchent le sol au travers de plein d’accessoires conférant aux emplacements une allure de « cour à scrap » ? Je vous laisse en juger. Voilà pourquoi, du point de vue d’un exploitant fier de son camping, imposer une limite d’âge aux VR peut sembler justifié pour contrer tout éventuel délabrement.
Je remets maintenant mon chapeau de caravanier pour envisager cette réalité sous un angle différent. Tout d’abord, un critère basé seulement sur l’âge d’une caravane ou de tout autre VR me semble à priori exagéré. Pour un autocar Prévost, vieux d’un an ou de 11 et converti en autocaravane, cette règle sonne faux. Faux également pour une Airstream de deux ou 20 ans ou d’une Alto qui, depuis sa création, conservent au premier coup d’œil la même allure, sans avoir pris une seule ride.
Plutôt que de poser l’année de fabrication comme un absolu, le camping devrait, dans le cas d’un véhicule hors de la limite de 10 ans, demander au propriétaire de fournir une photo du VR pour compléter sa réservation. Cette photo permettait de se faire une idée, non seulement de l’apparence du VR, mais également, de la qualité de l’entretien esthétique prodigué par son propriétaire. Moins blessante et plus respectueuse, cette façon de traiter la clientèle fournirait également à l’exploitant du camping une information précieuse sur la personnalité du caravanier qui souhaite s’y arrêter. Difficile en effet d’imaginer un caravanier propre et méticuleux qui serait membre de la famille Bougon.
Il est aussi un autre message douteux découlant de l’application de la norme « 10 ans » et celui-ci touche les commerçants de VR. Si les campings en viennent à appliquer systématiquement cette règle, cela voudra dire qu’il deviendra presque impossible de dénicher un établissement acceptant un véhicule de plus de dix ans. Implicitement, cela établira que la durée de vie utile d’un VR est de dix ans et que son propriétaire devra se réduire à camper dans la cour arrière de sa maison.
Amortir sur dix ans un VR, dont l’acquisition a souvent coûté plusieurs centaines de milliers de dollars, signifiera que son propriétaire verra son budget annuel alloué au caravaning se chiffrer à 10, 20 ou même 50 000 $, et ce, avant même de songer à prendre la route. Paradoxalement, dans ces conditions, une personne assez riche pour se permettre un tel niveau de dépenses n’aura surement pas le goût de se promener à bord d’un véhicule récréatif délabré.
Une autre conséquence néfaste risque aussi de se rattacher à la norme de l’âge des VR. Si l’âgisme appliqué aux VR se propage partout, cela constituera un élément de plus confirmant la piètre qualité de fabrication des véhicules récréatifs, puisque leur espérance de vie utile s’éteindra au moment de leur dixième anniversaire.
Non, définitivement, il est de l’intérêt de tous : commerçants de VR, exploitants de terrain de camping et caravaniers, que la date de péremption soit revue et modulée différemment, avec souplesse et respect, pour, avant tout autre critère, prendre en considération la condition réelle du véhicule récréatif qui commence à prendre de l’âge.
Note : Pour ceux qui l’ignore encore, vous devez me faire parvenir toute question n’ayant pas rapport au billet que vous venez de lire, en utilisant cette adresse : plaquerre@me.com.
Bonjour monsieur, excellente réflexion et surtout conclusion.
Merci pour ce choix de sujet pointilleux.
À la prochaine
On peut comprendre les propriétaires de terrains de camping de limiter pour les nouveaux saisonniers à 10 ans l’âge des VR car une fois sur le camping, le saisonnier va renouveler pendant plusieurs années sa présence. Ce concept existe depuis longtemps, Les campings avec un forte proportion de saisonniers augmentent cette proportion laissant de moins en moins de place pour les voyageurs. On a tous vu des campings déglingués aux États-Unis, ce que ne veulent plus les propriétaires de ces campings. Alors, ils se servent de cette règle et l’appliquent de manière élastique tout en tenant compte du cas par cas. Ce n’est pas parce que le VR a 12 ou 15 ans qu’il sera automatiquement refusé mais, cela donnera toute la latitude possible pour évincer un VR qui est non seulement vieux, mais a aussi l’air vieux et mal entretenu. D’ailleurs, qui voudrait un vieux VR déglingué comme voisin saisonnier… Nous voyageons depuis une quinzaine d’années au Canada et USA et à titre de voyageurs, cette question ne nous a jamais été posée. Je ne crois pas que cette règle soit appliquée à la lettre pour les courts séjours à moins que…
Estelle,
Comme vous, je connais l’élasticité de l’application de cette règle qui, ainsi que vous le dites a d’abord été pensée pour les caravaniers de long séjours. Toutefois, advenant que ce caravanier saisonnier, pour ne pas dire annuel, souhaitera vendre sa caravane âgée de plus de dix ans, celle-ci perdra automatiquement son droit de demeurer sur l’emplacement.
L’acheteur devant déménager sa nouvelle acquisition, cela se traduira par une baisse de la valeur de cette unité tout en réduisant d’autant le pouvoir de négociation du propriétaire original. Sur plusieurs camping où la règle de péremption est appliquée, je sais que l’on peut voir plusieurs caravanes qui trahissent leur âge. Mais, celles-ci seront vendues, le nouveau propriétaire de pourra pas espérer occuper le même emplacement puisqu’aucune clause grand-père (il serait ici plus juste d’écrire grand-mère) ne s’applique aux caravanes. Il s’agit d’un privilège non transférable consenti spécifiquement au propriétaire occupant l’emplacement au moment de la vente.
Nous sommes tous des Bougons aux yeux de quelqu’un d’autre. La mentalité de silo observée sur internet s’applique ds l’image projetée par nos possessions. Le différent nous préoccupe voire nous menace. Quand je vois un vieux VR défraîchi je vois une histoire et des expériences de vie, pas un simple “status symbol”. Des Français rencontrés qui voyageaient avec leur VR 2006 un peu défraîchi avaient de bien bonnes histoires à partager. De voyageurs à l’aise aux yeux des gens d’Amérique centrale, ils deviennent des Bougons chez nous. Idem pour un couple d’Argentine et leur vieux Westfalia rencontrés en Alaska. En souhaitant que les voyages aident à ouvrir les esprits et ne soient pas réduits à une simple forme de consommation.
Qu’adviendra-t-il de la valeur ou dépréciation des véhicules usagés? Quelqu’un voulant revendre son vr de plus de 10 ans trouvera-t-il un acheteur? Les concessionnaires auront le beau jeu quand un acheteur voudra acquérir un véhicule neuf avec échange de son vr usagé. Est-ce qu’on appelle »donner » en échange? Avec la piètre qualité des vr neufs, il est vrai qu’au bout de 10 ans, ils seront bons pour la poubelle.
Moi je vous prédis la fin du caravaning (saisonnier et Snowbird) pour la classe moyenne comme nous le connaissons d’ici deux à trois ans. Mon analyse: Floride hors prix, au Quebec agisme et coût des campings (SEPAQ, privé) , acquisition d’un VR hors prix, ect, ect. De plus l’essence et le taux d’intérêt pour ceux qui finance seront inaccessibles où inacceptable. Ce mode de vie sera réservé aux tres tres bien nantis et encore.
À Mission Bay à San Francisco je me suis fait demander les enregistrement pour vérifier l’âge de mon VR il était stationné devant la commis mais je devais montrer la preuve. J’ai trouvé ça ridicule meme en fin de semaine on m’a demande s’il était neuf après 10 ans . J’ai un NavionIQ c’est un modèle qui a bien vieillit et je l’entretien très bien
Très bonne suggestion la photo.
Notre vieille maison mobile en Floride a 40 ans. Recouverte d’un clapboard de vinyle et fenêtres jalousies remplacées par des fenêtres doubles, elle ne paraît pas son âge. Si le proprio mettait les vieilles maisons dehors, il perdrait 50 % de ses locataires. Alors on ne s’inquiète pas trop…
Mais une limite de dix, ce n’est pas raisonnable!
Au Breezy Hill à Pompano Beach en Floride, ils ont mis une limite de 20 ans. Ainsi lorsque votre équipement qui est fixé sur le terrain et dont vous êtes proprios et qu’il demeure en permanence, atteint 20 ans, vous ne pouvez plus le vendre; vous pouvez continuer à l’habiter mais ne pouvez le vendre. Donc si votre équipement a 23 ans et que vous ne voulez plus y demeurer, vous devez la déménager ou la donner au camping qui mettrons le buldozer dedans et il finira dans un conteneur pour les rebus.