Chronique d’une mort annoncée
Il est des habitudes tenaces qui collent à la peau. Des odeurs, des lieux déjà connus ramènent à notre esprit une expérience, un souvenir, Ainsi, cette semaine, alors que je roulais à Brossard, tel un réflexe, mon regard se tourna automatiquement en direction du camping Parc Champlain. Vide, aucun VR. Qu’était-il arrivé à ce petit camping urbain? Il me fallait en avoir le coeur net et tirer les choses au clair.
Ce camping, situé en pleine ville de Brossard, à une minute de marche du célèbre boulevard Taschereau, à la croisée Lapinière et Alain avait été créé en 1967. Comme le chantait le groupe Beau Dommage: «En 67 tout était beau, c’était l’année de l’amour, c’était l’année de l’Expo.
Profitant d’incitatifs financiers et administratifs reliés à l’Expo universelle de Montréal, M. Plouffe avait eu l’idée de développer un terrain de camping pour accommoder les visiteurs de l’Expo. Une trentaine d’emplacements tout au plus avaient donc vu le jour dans cette banlieue de la Rive-Sud qui, à l’époque, ressemblait encore à la campagne avec ses nombreux terrains vacants.
Avec les années, la construction domiciliaire poussa comme champignons et transforma la prairie en un quartier résidentiel achalandé. Maintes fois, M. Plouffe du affronter les différentes administrations municipales pour conserver le droit de maintenir son camping ouvert. Tel un Gaulois résistant à l’envahisseur romain, il gagna tous ses combats. Cependant, le Parc Champlain se retrouva rapidement enclavé par toutes les maisons avoisinantes. Qu’à cela ne tienne, M. Plouffe était têtu et ceux qui, comme moi, l’ont côtoyé savent très bien que ce mot est nuancé. Été comme hiver, le camping Parc Champlain pouvait accueillir les caravaniers de passage, mais aussi des travailleurs nomades désireux d’établir un camp de base.
De 1998 à 2001, Michelle et moi avons eu recours à ce camping pour nos quartiers d’hiver. Tôt au printemps, alors que les lieux retrouvaient leur aspect normal, celui d’un stationnement de pierre concassé, nous déménagions notre caravane à sellette au Parc Mont-Laval, le plus beau joyau des campings québécois, aujourd’hui disparu. Pour nous, il était hors de question de demeurer dans ce fond de cour de Brossard à se faire cuire sous le soleil.
Quand l’automne arrivait, alors que nos voisins du Parc Mont-Laval, demandaient où nous irions pour l’hiver, je répondais immanquablement que nous irions dans le sud. Lorsqu’arrivait une question plus précise sur notre destination, j’avais grand plaisir à voir leur binette lorsque je répondais Brossard. À ce moment de ma vie, j’étais encore au travail, je ne pouvais me permettre un séjour de plusieurs mois dans le sud des États-Unis.
Recouvert de neige, le Parc Champlain perdait son aspect estival délabré, et avec un peu d’imagination, il était possible de s’imaginer dans un ailleurs. Hiver comme été, ceux qui séjournaient dans ce camping le faisaient pour le côté accessibilité aux commodités de la vie urbaine. En 20 minutes, en pleine heure de pointe, des autobus empruntant la voie réservée du pont Champlain pouvaient amener touristes et travailleurs au centre-ville de Montréal.
Même si cela faisait quelques années que je ne fréquentais plus ce parc, mercredi après-midi, j’ai eu un choc en le voyant vide. Il fallait me rendre à l’évidence, le temps avait réussi ce que les différentes autorités administratives n’avaient pu faire. M. Plouffe, aujourd’hui octogénaire, a vendu son parc. Je vous fais le pari que le Parc Champlain deviendra sous peu une tour à condominium ou à logements.
Tout comme les humains, les campings naissent, croissent et meurent.
Les deux campings que vous mentionnez sont une perte pour les caravaniers. Les autorités municipales ne considèrent pas que cet aspect du tourisme est important pour leur ville. Je ne sais pas s’ils ont raison.
C’est d’ailleurs le même problème de toutes les « grosses » villes. Où camper pour les visiter?
Je ne connais que New-York avec son Liberty Harbor ou Nouvelle-Orléans qui offrent des campings à partir desquelles on peut facilement visiter la ville. Paris aussi, je crois. Hors de prix bien souvent, mais bien pratiques.
Il reste l’option des navettes.
Des campings à l’année, c’est une autre histoire. Eux aussi, ils devraient se multiplier au lieu de fermer.
Parfaitement d’accord avec Claudel: les grandes villes sont souvent difficiles à visiter en raison du manque de camping à proximité et trop peu de camping sont ouverts à l’année. D’ailleurs, déjà lorsque nous prenons la route vers la fin octobre et au retour au printemps, il est difficile de trouver des camping ouverts pour nous accomoder dans les états du nord et au Canada. Dommage…
Heureusement, il reste encore la halte routière sur l’ancien site du jardin zoologique de Québec qui offre un stationnement sans services individuels mais avec station de vidange et d’eau fraiche. Les autobus pour le centre-ville sont à distance de marche et il n’en coûte que 15$ par jour pour y séjourner. C’est quand même mieux que rien…