Attention aux gyrophares allumés
À défaut de pouvoir aller aux États-Unis cet été, plusieurs Québécois ont jeté leur dévolu sur les provinces canadiennes. Voilà pourquoi j’ai choisi aujourd’hui de vous rappeler l’importance de bien respecter les lois qui régissent la circulation routière au Canada. Pour illustrer mon propos, je vous raconte d’abord la mauvaise expérience vécue par un de nos compatriotes à la suite d’une contravention remontant à juillet 2016.
Revenant d’un périple l’ayant conduit jusqu’en Colombie-Britannique, alors qu’il roulait en Saskatchewan, Claude X croise une voiture immobilisée sur le côté de la route en direction inverse à la sienne. Derrière elle, deux voitures de patrouille, gyrophares allumés sont également stationnées alors que les officiers de police discutent avec le conducteur de la première voiture.
Conduisant dans les limites de la vitesse permise, Claude X continue simplement sa route sans juger nécessaire de s’arrêter ou de ralentir. Quelques kilomètres plus loin, une des deux voitures de patrouille le rattrape avec sirène et gyrophares en fonction pour l’interpeler. Après lui avoir demandé ses papiers, l’officier lui apprend qu’il est en infraction puisqu’il n’a pas ralenti en croisant les patrouilleurs dont les gyrophares étaient allumés quelques minutes plus tôt.
Surpris de ce propos, le Québécois plaide ne pas avoir commis d’infraction et respecté l’article de loi qui oblige à ralentir ou à changer de voie lorsqu’un véhicule d’urgence est immobilisé dans sa direction. Le policier retourne dans sa voiture pour procéder aux vérifications habituelles. En revenant auprès de l’autocaravane, il dit à Claude que, contrairement à la règlementation du Québec, dans sa province, peu importe que le véhicule d’urgence soit arrêté dans le sens contraire, tous les conducteurs, même ceux roulant en sens inverse doivent ralentir. Il lui remet une contravention de 335 $.
Jugeant inutile d’argumenter davantage avec un policier qui s’oppose à son interprétation, Claude reprend la route en se promettant bien que les autorités pourront toujours attendre car il n’acquittera pas la pénalité imposée. Huit mois plus tard, en mars 2017, le Québécois reçoit un avis du gouvernement canadien disant ceci :
Nous désirons vous informer que le paragraphe 164 (2) de la Loi de l’impôt sur le revenu autorise l’Agence du revenu du Canada à transférer tout remboursement ou crédit d’impôt auquel vous avez droit à des ministères fédéraux, provinciaux ou territoriaux dans le but de recouvrer certaines dettes encore impayées.
C’en est trop ! Estimant irréaliste de retourner en Saskatchewan pour demander une révision et défendre sa cause, Claude jette la serviette et paye la contravention, non sans maugréer. Écouter le récit de sa mésenvature a ramené à ma mémoire une expérience presque similaire vécue lors d’un voyage dans une des provinces de l’ouest.
Alors que je roulais sur la Transcanadienne, qui dans ce coin de pays est souvent à voies simples (une dans chaque sens), je vois une ambulance approcher dans ma direction, tous gyrophares allumés. L’automobiliste qui me précède applique rapidement les freins et se range en bordure de la route. Surpris de son excès de prudence, je continue mon trajet et croise l’ambulance quelques secondes plus tard.
Peu après, visiblement très en colère, l’automobiliste que je venais de dépasser, me double à son tour, klaxonnant sans arrêt, poing sorti par la fenêtre et me fait plusieurs doigts d’honneur. Étonné d’un tel comportement, je dis simplement à Michelle qu’il doit s’agir d’un Redneck ne portant pas les Québécois dans son cœur.
En prenant connaissance de la situation vécue par Claude X, je me suis demandé si moi aussi, je n’avais pas involontairement enfreint la loi et suscité la vindicte d’un citoyen voulant jouer au redresseur de torts. J’ai donc jeté un œil à ce qu’il en était de ce fameux corridor de sécurité qui prévaut un peu partout. Ailleurs au Canada et aux États-Unis cette mesure est désignée sous l’expression « Move Over Law ».
La responsabilité de fixer les règles de la sécurité routière incombe à chacun des états ou provinces. Il peut donc exister des différences entre chacun. Ainsi, au Canada, le principe du corridor de sécurité n’est pas une obligation dans certaines provinces et territoires et, là où il est de mise, ses modalités d’application peuvent varier d’une place à l’autre.
Ainsi, en Saskatchewan, la règlementation spécifie que le Mover Over Law prohibits driving greater than 60 kph while passing highway workers or equipment, emergency vehicles stopped with emergency lights flashing, and tow trucks stopped with amber lights flashing, road construction vehicles with lights flashing, and distinctively lit Ministry of Highways vehicles. Il s’agit d’une province anglophone, rappelons-le.
Ce texte dit qu’il est interdit de rouler à plus de 60 km/h pour dépasser un véhicule d’urgence, ou d’autres de différents types, immobilisé devant soit. Il est clair que cette obligation ne s’applique pas aux véhicules d’urgence stationnés dans la voie inverse.
Si tel avait le cas, le législateur aurait nécessairement utilisé deux mots, « passing » et « crossing » (doubler et croiser), pour dissiper toute ambigüité. Conséquemment, il est clair que l’officier qui a donné une contravention à Claude X avait mal interprété la loi et que ce dernier aurait sans nul doute gagné sa cause en cour.
Que faut-il retenir de tout ceci ? Quelle attitude doit-on adopter sur les routes à l’extérieur du Québec dont les règles nous sont peu ou pas familières ? Tout d’abord, garder en mémoire que, peu importe ce que la loi dit chez nous, celle qui a préséance est toujours celle qui s’applique là où nous roulons. Conséquemment, je crois que la meilleure façon de minimiser les risques consiste à appliquer le plus petit dénominateur commun aux variations règlementaires. Ainsi, que l’on roule dans une province ou un état qui applique la règle du corridor de sécurité ou non, conduire comme si celle-ci était en vigueur nous met automatiquement à l’abri du trouble.
Je rappelle à tous que lorsque vous désirez me faire part d’un commentaire ou encore d’une question ne se rapportant pas au sujet du jour, de communiquer avec moi par courriel à plaquerre@campingcaravaningmag.ca. De cette façon, votre adresse courriel me sera visible, ce qui me permettra de vous acheminer une réponse. Rien ne me désole plus qu’une question dont je ne peux retracer l’auteur. Merci d’en prendre note et vous y tenir.
Merci pour cette information M Laquerre. Il est clair que nous enfreignons la loi ailleurs tout comme chez nous sans le savoir. Vous vous souvenez de la Georgie qui exigeait un permis de conduire redige en Anglais. Quant aux limites de vitesse affichees sur nos routes Quebecoise, je me demande souvent a quoi elles servent. J’ai souvent l’impression que ma temerite a les respecter fait de moi un danger public. Nous sommes tres peu nombreux a apprecier le deplacement autant que la destination.
Je ne suis pas d’accord avec votre conclusion que notre confrère aurait gagné sa cause en justice. Les juges doivent souvent retourner au dictionnaire afin de juger de la portée des mots et ils doivent aussi retourner aussi loin que de se pencher sur les dépôts de lois à l’Assemblée nationale(Québec) afin de relire les argumentaires tenu par les députés afin de comprendre le fondement de la loi.
Ainsi, en anglais le mot « passing » veut tout simplement dire passer à côté ou tout près. Un conducteur pourrait se faire dire par un passager, « After passing the river take the next exit on the highway » ce qui voudrait dire après avoir passé la rivière prend la sortie. Cette rivière n’est ni à droite ni a gauche, elle est sous l’autoroute, donc « passing » peut vouloir dire à la hauteur de notre position. C’est ainsi qu’un avocat peut amener un juge à interpréter un article de loi, puis les autres décisions se baseront sur cette jurisprudence afin de normaliser l’article de loi. Le problème est que l’article dans le code de la route ne sera pas changé. Il existe des répertoire de jurisprudences qui regroupent les décisions les plus marquantes, mais personne n’achète ça, à moins d’être un avocat ou un recherchiste légale.
Une dernière pour illustrer mon propos, cette semaine j’ai lu qu’un juge avait interprété qu’une vapoteuse avec un écran était soumis à l’article sur les cellulaires, qui est en fait un article qui mentionne tout écran électronique. On voit la porté de l’interprétation que les juges peuvent faire.
Martin Leduc,
Je souscrit à plusieurs points évoqués dans votre commentaire. Moi-même, en écrivant ce billet, je m’étais interrogé sur l’extension du mot «passing». J’ai toutefois déduit que le législateur l’utilisait vraiment dans le sens de dépasser puisqu’un peu plus loin dans son texte de loi, il mentionnait que, si la chose était possible, le conducteur devait changer de voie. Il devenait clair à mon esprit que cette directive n’avait de sens que si le mot «passing» signifiait dépasser un véhicule. Autrement, dans le cas où le véhicule d’urgence s’était trouvé à contresens, changer de voie aurait signifié s’en rapprocher, ce qui de toute évidence n’aurait pas respecté le principe de sécurité justifiant la «Move Over Law».
Martin Leduc,
Aux États-Unis, en de nombreux endroits, des affichettes sur le bord de la route se lisent ainsi: «Do not pass». Chaque fois, elles sont stratégiquement placées à un endroit où dépasser est interdit ou dangereux ou lorsque des travaux routiers rappellent aux conducteurs de ne pas changer de voie pour doubler un autre automobiliste.
À mon avis, cela confirme le sens que j’attribuais au mot «passing» puisque, s’il voulait dire croiser ou passer, cela reviendrait à dire que ces affichettes signifieraient qu’il est interdit de rouler sur la route où elles se trouvent. D’ailleurs, dans l’exemple que vous mentionniez, « After passing the river take the next exit on the highway », la traduction de cette expression se dirait plutôt ainsi : après avoir dépassé la rivière, prendre la prochaine sortie d’autoroute.
Bien dit Paul, vous auriez fait un bon avocat, dans la présente, vous faite un bon avocat du Diable!
Les subtilités et les nuances des langues. Souvent compliqué pour les gens qui ont seulement un anglais fonctionnel. Cependant, on ne sait rien de la vitesse du monsieur qui s’est fait intercepter pour ne pas avoir ralenti. Avez-vous déjà eu la chance de parler avec quelqu’un qui venait de se faire remettre un billet d’infraction dire qu’il l’a mérité???
Estelle,
La contravention reçue par personne dont j’ai parlé ne lui a pas été signifiée pour avoir outrepassé la vitesse légale affichée sur le bord cette route, mais plutôt pour ne pas avoir ralenti en arrivant près d’une voiture de police immobilisée avec gyrophares allumés.
Il a mérité cette contravention même si c’était en sens inverse,
On parle ici d’interprétation de lois ailleurs qu’au QC, alors qu’une majorité de conducteurs applique mal la notion de corridor de sécurité lorsqu’un véhicule d’urgence est immobilisé sur l’accotement .
Dans un tel cas, il faut ralentir et s’éloigner sans nécessairement changer de voie.
Une majorité change complètement de voie même sur une autoroute, ce qui engendre des freinages brusques dans la file de circulation.
Voici un résumé des lois du Canada et également Américaines pour la notion de couloir de sécurité….et contrairement à la dernière affirmation…s’il est possible de changer de voie en sécurité il est recommandé de le faire tout en ralentissant la vitesse….pour ce qui est de la Saskatchewan….Réduire sa vitesse à 60 km/h ou moins sauf si on se trouve sur une autoroute à voies divisées et si on se déplace dans une direction opposée….
M. Tremblay: vous me faites dire des choses que je n’ai pas dites.
J’ai utilisé l’expression « sans nécessairement changer de voie ».
Donc votre prétention « contrairement » est inexacte.