Alberta – Les Rocheuses dans toute leur splendeur
Le soleil est à sa pleine force lorsque, sur le bleu immaculé de l’horizon se dessine le premier sommet blanc des Rocheuses. À partir de ce moment, la route ne sera plus qu’une interminable succession de splendeurs à s’en étourdir.
La très grande majorité des voyageurs choisissent d’aborder les Rocheuses en se rendant directement à Banff à partir de Calgary. Un grand nombre d’entre eux n’iront pas plus loin que le lac Louise ou, au maximum, au glacier Athabaska, avant de repartir vers le Sud, la vallée de l’Okanagan et la Côte-Ouest. J’ai, pour ma part, abordé le territoire dans l’autre sens, comme les voyageurs au long cours qui reviennent des Territoires du Nord-Ouest ou du Yukon et de l’Alaska. Je suis arrivé par le Nord après une visite des communautés francophones de la région de Rivière-la-Paix. Cela représente quand même un assez long détour de 1 300 km par le Nord, au départ d’Edmonton. Mais, quand on a le temps, comme nombre de caravaniers à la retraite, on peut faire tous les détours que l’on veut. Précisons quand même qu’il n’y a que 360 km entre Edmonton et Jasper en droite ligne. Ma route vers les montagnes Rocheuses s’étire donc de Peace-River à Grande-Prairie dans un environnement agricole typique des Prairies. Puis jusqu’à Grande-Cache, alors que la route s’élève constamment en traversant la forêt. Et, enfin, jusqu’aux abords de Hinton où l’on rejoint l’autoroute Yellow Head pour se diriger franc ouest vers Jasper et les sommets qui occupent de plus en plus d’espace dans le champ visuel.
Sur la route de Jasper
Dès que l’on franchit la barrière du Parc national du Canada de Jasper, on plonge dans le monde des géants et dans un univers où la canicule ne semble pas impressionner les masses de neige et de glace pénibles à admirer tant leur brillance est insoutenable. Les premières montagnes coiffées de blanc, comme le mont Pyramide qui fait moins de 2 800 mètres, ne composent qu’une entrée en matière, quand même des plus agréables à contempler comme le font les voyageurs les plus chanceux sur cette route, ceux qui ont leur maison avec eux. Car voilà effectivement une destination idéale lorsqu’on prend la route en autocaravane et que l’on peut faire la pause devant chacun des tableaux naturels qui se présentent. C’est le mode de transport et de logement préconisé par plusieurs touristes de l’étranger qui louent de quelques compagnies nationales des véhicules récréatifs de classe B, tous semblables. On vient aussi du Québec et du reste de l’Amérique du Nord avec toutes les variétés de caravanes et de véhicules imaginables. Le nombre étonnant d’amateurs de camping que l’on croise sur la route des Rocheuses en témoigne éloquemment. Ils profitent largement de leur liberté de mouvement et de leur confort à portée de main qui leur permet de s’arrêter sur chaque halte et d’en faire son jardin à soi durant quelques moments. Les parcs nationaux sont aussi magnifiquement équipés en fait de camping, souvent situés à proximité des sentiers de randonnée ou des principaux attraits. Le secteur du parc de Jasper, à lui seul, compte 10 terrains de camping et plus de 1 700 emplacements.

Au fil de la route, les animaux sauvages abondent. Le parc en abrite 69 espèces. Wapitis, mouflons d’Amérique, grizzlys, orignaux, coyotes et d’autres fréquentent les abords de la route, souvent avec une familiarité déconcertante et dangereuse. Plusieurs automobilistes inconscients les approchent sans méfiance, ce qui crée régulièrement des problèmes. Mais lorsque l’observation se déroule dans les règles de l’art, c’est un spectacle fascinant que de voir ces animaux, grands et petits, s’ébattre dans leur environnement naturel.

Il passe ainsi une trentaine de kilomètres de la barrière à la ville, au long desquels on peut s’arrêter aux sources thermales Miette d’où l’eau qui jaillit de terre à 57 °C doit être refroidie à 39 °C pour être baignable, parcourir le sentier d’interprétation de la mine de charbon de la ville fantôme de Pocahontas, admirer les dunes de sable du lac Jasper… Il y a 1 300 km de sentiers pédestres, équestres ou VTT dans les limites du Parc. Les points d’intérêt ne manquent pas. Toutefois, la révélation de l’ensemble de ma traversée des Rocheuses albertaines est survenue sur un chemin qui croise la route principale à quelques minutes à peine de Jasper. Elle conduit à l’un des plus beaux plans d’eau des Rocheuses.
Le lac Maligne
La route du lac Maligne (46 km) est un incontournable absolu. Un véritable concentré de tout ce que les Rocheuses ont à offrir. On s’y engage en empruntant le pont du chemin de fer qui enjambe la rivière Athabaska et, à quelques kilomètres seulement, on a déjà un point de vue saisissant sur la ville de Jasper et les sommets qui l’encadrent. C’est à voir dans les heures qui suivent le lever de soleil. Un peu plus loin, lorsqu’on croise la rivière Maligne, on tombe sur le canyon Maligne dont un court sentier nous permet de faire le tour. Cette gorge profonde, les cascades qui s’y jettent et les marmites gigantesques creusées par les remous offrent un spectacle captivant. La route atteint ensuite le superbe lac Medecine qu’on voit sur toute sa longueur et qui se remplit lentement avec la fonte des neiges. Puis, on frappe le grand coup à la vue du lac Maligne qui laisse pantois. Le plus grand lac des Rocheuses fait 22 km de long et 97 m de profond. L’image classique du lac glaciaire s’il en est. Des sommets enneigés à profusion qui lui font une couronne colossale. Les canots et les kayaks du Boat House qui dorment paisiblement au pied des eaux émeraude. Quelques pêcheurs au lointain. Un vrai rêve. Le lac Louise n’a plus qu’à aller se rhabiller !

Tours Maligne offre des croisières d’interprétation de 90 minutes qui conduisent devant l’île Spirit où les photographes amateurs peuvent réaliser la photo de leur vie à la seule condition de ne pas avoir les deux yeux dans le même trou.
Jasper
L’ancien poste de traite, situé à environ 250 km au nord de Banff, a séduit plusieurs Québécois comme Pierre Frigon, directeur de l’hôtel The Sawbridge Inn, qui y vit depuis 30 ans et pour qui : « Jasper, c’est comme Banff… Mais en plus beau ! » Caroline Longtin, qui travaille pour le parc national depuis 12 ans, est également comblée par cette ville de 4 000 habitants dotée de services exceptionnels pour ses résidents (école française, piscine, etc.) et où l’on trouve une communauté francophone relativement nombreuse. Jasper est aussi un carrefour ferroviaire important, ce qui lui donne un visage « industriel ». Mais son caractère touristique reste indéniable quand on arpente Connaught Drive et la rue Patricia avec leur alignement d’hôtels, de restaurants et de boutiques de souvenirs. On a également une très belle vue sur Jasper à partie du sentier pédestre de la terrasse Pyramid ou sur toute la région montagneuse à bord du Jasper Tramway.
Mont Robson
J’avoue que, en quittant Jasper, je me suis trompé de route et suis parti vers la Colombie-Britannique sur la route #16. Je m’en suis rendu compte en arrêtant devant le mont Robson, le point culminant des Rocheuses canadiennes qui s’élève à 3 954 mètres. L’aller-retour de 150 km en valait finalement la peine !

– Info : Parc national de Jasper www.pc.gc.ca/jasper
– Centre de réservation de camping de Parcs Canada : 1 877 737-3783/www.pccamping.ca
– Les parcs nationaux de Banff et de Jasper offrent des services en français aux barrières d’accès, aux centres d’information et presque partout.
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